Le 29 juin prochain, Edgar Bierry va participer à son tout premier Ironman à Nice. Victime d’un AVC au début de l’année 2024, il a totalement changé son hygiène de vie pour faire du sport un élément central de sa renaissance.
Edgar, qui étiez-vous avant cet AVC et quel était votre rapport au sport ?
Durant mon enfance et ma préadolescence, j’avais toujours été sportif. Je suis passé par des sports collectifs, des sports individuels, mais je n’avais jamais vraiment eu de rigueur dans le sport, hormis quand j’étais au collège. Une année avant mon accident, j’avais un style de vie qui était très mauvais. Je sortais, j’avais complètement arrêté le sport. J’étais focalisé sur mes études et je voyais le monde de la fête et le fait de sortir comme un exutoire pour les études. Je n’avais pas le sport pour relâcher tout ce stress et toute cette pression. Ça m’a fait prendre énormément de poids. Par effet secondaire, je pense que c’est ce qui a causé cet AVC au début de l’année 2024.
Cet AVC, ça a été un électrochoc ?
Tout à fait, il y a tout de suite eu une prise de conscience. Comme tout monde, lorsque ça arrive, je me suis demandé « qu’est-ce qui se passe ? » Mais au fond, je savais très bien que j’avais vraiment abusé au niveau de ma santé et de mon style de vie. Sans cet accident, peut-être que je n’aurais jamais changé, je ne me serais pas remis au sport. Donc je ne suis pas fataliste, je pars du principe que c’est arrivé parce qu’il fallait que ça arrive. J’ai pu tirer du bien de cet événement, même si ça a été très stressant et j’ai eu très peur.
Reprendre le sport est arrivé assez vite, comme une évidence. J’avais tout perdu en termes musculaires, en termes cardio, et donc je me suis décidé à reprendre petit à petit. Dans un premier temps avec une phase de perte de poids qui a duré pratiquement 10 mois. Et ensuite, par hasard, j’ai commencé la course à pied en septembre 2024. Puis le vélo et la natation sont arrivés. Je me suis très vite mieux senti au niveau cardio, au niveau mental aussi.
« Je voulais donner du sens à ce projet »
Le projet de prendre part à un Ironman est donc arrivé assez vite…
En effet, je me suis rapidement donné des défis jusqu’au moment où je voulais donner du sens à ce projet. J’avais envie d’aider, envie que ça serve à quelque chose, que ce ne soit pas qu’un acte égoïste de se remettre au sport. J’ai donc entamé des démarches auprès d’associations. J’ai eu un à deux mois de discussion avec plusieurs associations. C’est finalement l’Institut du Cerveau qui m’a répondu, avec laquelle j’ai ouvert une cagnotte pour récolter des fonds. Ensuite, j’ai pris l’initiative de commencer à créer du contenu audiovisuel autour de mon projet, que ce soit sur YouTube, Instagram, TikTok, afin de sensibiliser à mon échelle et de pouvoir créer une communauté autour de cela.
La finalité, c’est donc de participer à mon tout premier Ironman, à Nice, le 29 juin, Ce sera vraiment la consécration d’un an de travail, de remises en question, de beaucoup de doutes, dont je me suis servi pour me donner la force de m’entraîner.
La préparation d’un Ironman est particulièrement exigeante, quelles séquelles gardez-vous de votre AVC ? Cela a-t-il nécessité une adaptation au niveau de la préparation ?
Le plus important, après un tel événement, c’est de s’écouter. Il faut écouter son corps encore plus et apprendre à se tenir à un rythme, à être régulier dans sa pratique sportive pour habituer notre corps à un effort qui est extrême. C’est le même processus que j’ai utilisé lors du Marathon de Paris au mois d’avril. C’est le fait d’écouter son corps, d’aller à son rythme, tout en cherchant à se dépasser.
Mon programme d’entraînement dure depuis septembre dernier. on a environ neuf à dix mois de préparation. Pour ma part, dès que j’ai commencé à m’entraîner, j’ai voulu faire attention à la surcharge d’entraînement. J’ai fait face à quelques blessures typiques de coureurs amateurs, comme un syndrome de l’essuie-glace et un syndrome rotulien. J’ai écouté mon corps et ça m’a permis de guérir plus vite et d’adapter mes entraînements avec un peu plus de natation, un peu plus de vélo. Sur une semaine typique, on est entre 11 et 14 heures d’entraînement, avec beaucoup de renforcement musculaire au niveau des jambes. Sur ce premier Ironman, l’idée est vraiment d’arrivée au bout et de finir, je me suis préparé en conséquence.
« Ma grand-mère trouve que ce n’est pas possible physiologiquement de faire ça »
La reprise d’une activité sportive aurait pu se faire sur pas mal de disciplines. Pourquoi le triathlon ?
Le fait de se vider la tête, c’est une des raisons pour lesquelles j’aime ces trois sports. Le fait d’être à l’extérieur ou d’être dans l’eau, c’est pour moi un sentiment d’évasion et une manière de souffler. En course à pied, ça permet vraiment de repenser à soi, de réfléchir, de se vider la tête. S’entraîner, c’est devenu mon quotidien. Aller m’entraîner, je n’attends que ça dans la journée.
Comment vos proches vivent-ils cette transformation et ce projet autour du sport ?
C’est mitigé ! D’un côté, il y a de l’admiration, de l’autre, je passe parfois pour un fou. Quand je parle des distances que je réalise, ma grand-mère trouve que ce n’est pas possible physiologiquement de faire ça. Mon père, ça le fait rire ! J’envisage aussi de faire de l’alpinisme, et sur ce point-là, ils ne sont pas forcément d’accord, même si mon père est beaucoup plus ouvert par rapport à cela. Au global, il y a une certaine fierté par rapport au travail que je mène avec l’Institut Cerveau et le contenu audiovisuel que je propose sur les réseaux sociaux. J’ai engagé une équipe de production, j’ai un réalisateur avec qui je monte des projets vidéos. C’est un tout qui leur fait plaisir, étant donné qu’ils me voient heureux dans ce que je fais.
« Je referai un Ironman »
Après l’Ironman de Nice, quels sont vos projets ?
Dans un premier temps, la priorité restera l’ultra triathlon. Je referai un Ironman, mais je ne sais pas encore dans quelle ville. Le but sera de se qualifier pour le championnat du monde d’Ironman en 140.6, dans ma catégorie 18-24 ans. J’ai également envie de réaliser des défis sportifs dans le domaine de l’alpinisme, de la natation et de la course à pied type trail et ultra-trail. Il y a d’ailleurs déjà des événements de trail et ultra-trail qui sont prévus. J’aimerais aussi réaliser un défi qui tourne autour du GR20. Les projets, j’en ai plein ! La première chose que je me suis dit lorsque j’ai eu cet AVC et que je me suis remis au sport, c’est qu’il n’y avait plus de limites et que je n’avais qu’une envie, c’est me sentir vraiment vivant.