Entre son année en Italie, sa passion absolue pour le futsal et sa volonté de devenir professeure d’EPS, Faustine Pellegry incarne une nouvelle génération de sportives ambitieuses, polyvalentes et déterminées. Nous avons échangé avec elle sur son parcours, son amour pour cette discipline encore méconnue. Portrait de la première joueuse française professionnelle.
Faustine, commençons par le début : comment êtes-vous tombée dans le futsal ?
C’est une histoire assez originale. Mon tout premier contact avec le ballon, c’était grâce à un stage de futsal pendant des vacances scolaires. C’est un voisin, déjà impliqué dans la discipline, qui m’a encouragée à y aller. J’ai fait ce stage avec ce qui s’appelait à l’époque le FC Erdre, devenu ensuite Nantes Métropole Futsal. Et ce qui est fou, c’est que les coachs que j’ai rencontrés à ce moment-là sont ceux que j’ai retrouvés plus tard, en 2015, quand je suis revenue au club, cette fois pour m’y engager sérieusement.
À 18 ans, j’ai pris une décision importante : arrêter complètement le foot à 11 pour me consacrer uniquement au futsal. Ce qui me plaît dans ce sport, c’est à la fois l’intensité, le jeu rapide, les qualités techniques nécessaires… mais aussi l’intelligence tactique qu’il demande. Tu dois lire le jeu en permanence, anticiper, t’adapter. Et je sens vraiment que c’est dans ce cadre-là que je m’épanouis le plus.
Vous avez passé cette dernière saison à Milan, en Italie. Comment ce projet s’est-il construit ?
L’an dernier, dans le cadre de mes études pour devenir professeure d’EPS, je devais effectuer un stage. Je l’ai trouvé dans un lycée français à Milan. J’ai donc cherché un club de futsal dans la région, et c’est là que j’ai découvert Kick-Off, un club très structuré. J’y suis allée une première fois en décembre, puis en février, pour m’entraîner. En fin de saison, ils m’ont proposé un contrat pour intégrer leur équipe première cette année. Une opportunité incroyable.
Quelles différences avez-vous ressenties entre le futsal français et celui que vous avez connu en Italie ?
D’abord, il faut dire que le niveau en Italie est très élevé. C’est un championnat professionnel, donc les joueuses ne font que ça. Elles s’entraînent ensemble quatre à cinq fois par semaine. Il y a une vraie intensité athlétique, et un suivi quotidien.
Mais j’avais déjà une préparation très solide avec Nantes Métropole Futsal. On avait accès au CREPS, un suivi médical, un encadrement tactique très pointu. Donc je n’ai pas eu un choc brutal. Ce qui change vraiment, c’est la régularité des entraînements, les automatismes créés entre les joueuses.
Certains clubs comme Bitonto ou Falconara ont une vraie communauté derrière eux. Il y a du monde dans les tribunes, des chants, des tifos… Ça crée une atmosphère incroyable. En tant que joueuse, ça te pousse à te surpasser. Mais c’est aussi un défi mental, car parfois, cette pression est contre toi. Il faut apprendre à la gérer.
Vous êtes aussi devenue la première joueuse française à obtenir le statut professionnel en futsal. Cela fait quel effet ?
Pour être honnête, je ne m’en rendais pas compte au début. Mais très vite, ça a suscité de la curiosité, notamment en équipe de France. Les filles me posaient des questions, voulaient savoir comment ça se passait. Moi, je ne me considère pas comme une joueuse exceptionnelle par mon niveau — il y en a plein avec un excellent niveau en France. Ce qui est exceptionnel, c’est le parcours que j’ai eu.
C’est une vraie fierté. Parce que je vois que mon nom commence à apparaître quand on parle de futsal féminin, que des jeunes peuvent s’identifier. Et si ça permet de montrer qu’on peut avoir une vraie carrière dans cette discipline, qu’on peut s’épanouir ailleurs que dans le foot à 11, alors tant mieux. J’ai envie d’ouvrir des portes.
En parallèle de votre carrière sportive, vous poursuivez des études pour devenir professeure d’EPS. Pourquoi ce choix ?
C’est un métier que j’aime profondément. Transmettre, encadrer, accompagner… ça me parle. En plus, ça me donne un cadre, une sécurité pour l’avenir. Cette année, je passe le CAPEPS. C’est beaucoup de travail, j’ai passé mes écrits en mars, mes oraux approchent. C’est une période intense.
Quel message aimeriez-vous faire passer aux jeunes qui s’intéressent au futsal ?
J’ai envie de leur dire : foncez ! Aujourd’hui, on peut encore pratiquer à la fois le foot et le futsal. Beaucoup de filles de l’équipe de France le font. Mais il faut aussi savoir qu’il existe une vraie voie dans le futsal.
Quand tu es jeune, tu as besoin d’exemples, de modèles. Si je peux incarner cela pour certaines, c’est magnifique. Le futsal est une discipline complète, exigeante, passionnante. Ce n’est pas juste une version « d’intérieur » du foot d’hiver. C’est un sport à part entière, avec sa propre culture, ses propres codes. Et il mérite d’être connu.
La FFF a annoncé la création d’un championnat national féminin de futsal pour 2026-2027. Qu’en pensez-vous ?
Franchement ? ENFIN. On est nombreuses à l’attendre depuis des années. Avoir un championnat national va permettre de structurer la discipline, de créer de la visibilité, et surtout… de faire progresser le niveau général. Parce que quand tu joues chaque semaine pour trois points, dans un vrai championnat, avec des objectifs, forcément, tu t’améliores.
Et pour l’équipe de France aussi, ce sera un vrai plus. On pourra s’appuyer sur des joueuses en rythme, qui ont l’habitude de jouer des matchs à enjeu. C’est une étape indispensable. Je suis super fière que ça arrive enfin.
Quels sont vos objectifs pour la suite ?
D’un point de vue personnel, décrocher mon concours de professeure d’EPS.
Côté sportif, avec l’équipe de France, l’objectif, c’est clair : se qualifier pour l’Euro 2026, qui pour la première fois comptera huit équipes. Jusqu’ici, c’était limité à quatre. Donc on a toutes nos chances.
Et au niveau du club… eh bien, que du positif. Je veux continuer à progresser, à prendre du plaisir, et à représenter fièrement cette discipline que j’aime tant.
Propos recueillis par Solal Polese