À 27 ans, Quentin Isy-Schwart trace son sillon dans les abysses méditerranéens, porté par une passion née d’un héritage familial et d’une résilience hors du commun. Désormais sélectionné en équipe de France, il participera en septembre aux championnats du monde d’apnée en Grèce. Une revanche sur la vie… et une leçon de souffle.
Quentin n’a jamais eu peur de se mouiller. Dans sa famille, l’eau est une tradition : un grand-père pionnier de la chasse sous-marine, un père vidéaste des fonds marins. C’est donc presque naturellement qu’il plonge un jour dans l’apnée, en Corse, sans s’imaginer que cette discipline allait bouleverser son existence. Il a 24 ans, aucune expérience en compétition, mais un instinct brut : dès les premiers jours, il atteint les 40 mètres. Un exploit pour un débutant, repéré aussitôt par Abdel Alouach, multiple champion du monde et recordman en apnée.
Des racines dans l’eau, un destin dans le bleu
« Il m’a pris sous son aile, alors que je ne m’étais jamais entraîné. Ça a tout changé », raconte Quentin.
En trois ans à peine, il enchaîne les progrès et les podiums. Cette saison, il a décroché deux médailles aux championnats de France – argent et bronze – et a remporté l’or en brasse aux championnats de Corse, se classant également vice-champion en bipalmes. Aujourd’hui, sa progression est récompensée par une sélection en équipe de France. Direction la Grèce, pour les championnats du monde du 5 au 18 septembre.
C’est l’apnée elle-même qui lui sauvera la vie. Lors d’un simple contrôle médical obligatoire pour une compétition, un médecin remarque un petit nodule à la thyroïde. Les examens s’enchaînent, le diagnostic tombe : cancer. Quentin n’a pas de symptômes visibles, mais la maladie est bien là. « Je n’en parlais pas. J’avais peur qu’on me voie comme faible », confie-t-il.
Un souffle sauvé, une vie transformée
Il est opéré à temps, suit un traitement léger, reprend son souffle… et replonge. Plus fort. Plus concentré. Plus vivant.
« Aujourd’hui, quand je suis au fond, à 85 mètres, et que mes jambes fatiguent, je pense à la salle d’opération. Et je me dis : t’es passé par là, alors vas-y. » L’apnée devient alors bien plus qu’un sport : un exutoire, une manière de reprendre le contrôle sur son corps et sa trajectoire.
Guéri, Quentin a choisi de témoigner. Pour briser les tabous, soutenir la recherche (notamment à travers l’association Imagine For Margo) et inspirer les jeunes malades. « Ce n’est pas parce qu’on est malade qu’on ne peut pas rêver ou réussir. Le talent, c’est bien, mais le travail, c’est ce qui fait tout. »
Cap sur les 100 mètres… et plus encore
Aujourd’hui, Quentin s’entraîne dur : natation, vélo, musculation, plongées progressives, visualisations mentales… Chaque session est calibrée. Chaque mètre conquis est une victoire sur lui-même. Sa spécialité, la bipalme, le porte à 85 mètres de profondeur. Mais en Grèce, il vise les 100 mètres. Un cap symbolique autant qu’un défi personnel.
Aux championnats du monde, il affrontera les meilleurs de la planète – des athlètes russes, italiens, français, parmi lesquels Arnaud Jerald ou encore son mentor, Abdel Alouach. Pas question de se contenter d’être là. Quentin veut jouer, tenter, peut-être décrocher une médaille. Et surtout, continuer à progresser.