Dans une interview, Nick Robinson, CEO de Maison Sport, revient sur la genèse de la plateforme et sur sa volonté de moderniser un secteur du ski longtemps resté en retrait sur le plan digital. Lancée en France, Maison Sport entend améliorer l’expérience des skieurs tout en renforçant les conditions de travail des moniteurs indépendants, grâce à une approche fondée sur la personnalisation et la mise en relation directe.
Qu’est-ce qui a initialement motivé la création de Maison Sport et pourquoi est-ce unique sur le marché européen du ski ?
En 2014, alors que j’étais moniteur de ski à Courchevel, j’ai constaté que l’industrie du ski était très en retard : il n’était pas possible de réserver des cours en ligne et pour les clients, tout était compliqué. J’avais le sentiment que le ski n’avait pas suivi l’évolution du secteur du voyage. La motivation principale était donc d’améliorer l’expérience client, mais aussi d’aider les moniteurs de ski indépendants, dont beaucoup avaient des difficultés à exister en ligne par manque de moyens. La question était : comment améliorer concrètement leur situation ? De là est née une vision plus large : améliorer la vie des moniteurs de ski à travers l’Europe, en commençant par la France, zone que l’on connaissait le mieux. L’objectif était d’améliorer leurs conditions de travail tout en offrant aux clients plus de personnalisation, en leur permettant de choisir leur moniteur, d’échanger directement avec lui et de consulter les avis…
Comment le marché français s’intègre-t-il dans votre stratégie globale ?
C’est vraiment le cœur de la stratégie. C’est le premier marché sur lequel nous nous sommes lancés, là où l’entreprise a démarré. Et je pense que le marché est immense : c’est l’une des destinations les plus populaires au monde pour le ski et aussi l’un des endroits les plus attractifs pour travailler en tant que moniteur de ski. Je vois donc la France comme le cœur de l’activité pour l’avenir.
Maison Sport a travaillé avec plus de 400 moniteurs réservés en France cette saison. Comment avez-vous construit une telle présence nationale ?
Le bouche-à-oreille, tout simplement. Les moniteurs semblent vraiment apprécier la plateforme et ils en parlent à leurs amis. Nous pensions que cela irait plus vite, mais curieusement, lorsqu’un moniteur réussit très bien dans une station et gagne bien sa vie, il a tendance à garder cela pour lui. Mais avec le temps, le secret finit par se répandre et ils en parlent entre eux. Nous avons dépensé très peu d’argent en marketing à destination des moniteurs. La croissance s’est faite presque exclusivement grâce au bouche-à-oreille.
Comment les acteurs traditionnels en France, comme les écoles de ski ou les organisations locales, réagissent-ils à cette nouvelle approche ?
Au départ, l’ESF n’était pas certaine de la position à adopter et a dû prendre une décision. De nombreux moniteurs de l’ESF ont rejoint la plateforme et pour nous, ce n’était pas vraiment une plateforme destinée aux moniteurs travaillant dans des écoles de ski. Mais nous ne savions pas non plus quoi faire, alors nous avons laissé la situation évoluer pendant un certain temps. Ils ont finalement décidé qu’ils ne souhaitaient pas que leurs moniteurs soient présents sur notre plateforme, ce qui est compréhensible, car cela crée des défis opérationnels pour eux. Depuis, il n’y a rien de vraiment négatif. Je dirais que les moniteurs en France qui rejoignent la plateforme sont ceux qui en ont envie. Au final, cela améliore leur niveau de vie : ils gagnent plus d’argent et ont plus de liberté.
Quelles nouvelles tendances observez-vous chez les skieurs français ?
Je pense que c’est une tendance que l’on observe non seulement chez les clients français, mais plus largement. Il y a eu, ces deux ou trois dernières saisons, une envie d’aller vers des stations plus hautes en altitude. Mais l’hiver dernier, nous avons connu une très bonne période à Noël, en décembre et janvier. L’enneigement était très bon partout en France et cet hiver, nous avons donc constaté un fort retour des stations de plus basse altitude sur les réservations de début de saison, en décembre et janvier, ce qui est très positif. En matière de personnalisation, historiquement, les clients français passaient par l’ESF et suivaient le système traditionnel des étoiles. Aujourd’hui, plus que jamais, ils voient l’intérêt de ne pas seulement inscrire leurs enfants à des cours collectifs, mais aussi à des cours particuliers. Et Maison Sport permet de choisir son moniteur. Je pense qu’ils commencent à comprendre que la personnalisation offerte peut réellement bénéficier à leurs enfants et à leurs vacances.
À l’avenir, quelles innovations ou ambitions souhaitez-vous développer pour renforcer la position de Maison Sport en France et en Europe ?
Un axe majeur pour nous est d’augmenter le nombre de moniteurs sur la plateforme afin d’offrir plus de choix aux clients. Cela inclut également les stations plus petites, qui sont populaires auprès des clients français. Nous menons donc une grande campagne cet hiver, avec 50 événements organisés tout au long de la saison pour recruter davantage de moniteurs. C’est un moment clé pour nous en France. La situation est différente de certains autres pays : nous avons désormais une activité très solide et c’est le bon moment pour augmenter fortement l’offre. Par ailleurs, nous espérons lancer une application pour les clients. C’est particulièrement important pour ceux qui réservent avec nous chaque hiver, car cela leur permettra de communiquer directement avec les moniteurs, entre autres fonctionnalités. Pas forcément pour cet hiver, mais au-delà de cette saison, nous envisageons également de proposer davantage d’activités sur les pistes, comme la raquette ou certaines formes de guidage hors-piste.

























