Victoire Andrier : « L’escalade aux Jeux, c’est une bouffée d’air »

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Parmi les meilleures grimpeuses françaises en escalade de vitesse, Victoire Andrier veut être de la fête aux prochains Jeux olympiques. Première du classement général de la Coupe d’Europe l’an passé, la Tricolore veut désormais se faire une place dans l’élite mondiale.

Commençons par le début, comment en êtes-vous venue à l’escalade, et pourquoi avoir choisi la vitesse ?

J’avais essayé plusieurs sports avant. Du ski, du tennis, de l’athlé, du judo, j’ai beaucoup testé avant de découvrir l’escalade, à 7 ans. Directement, ça a été un énorme déclic, et je n’ai jamais arrêté. Petit à petit, j’ai fait des compétitions et c’est devenu de plus en plus sérieux, au point de m’y consacrer vraiment et d’oublier les autres sports. Le choix de la vitesse est venu plus tard, parce que cela correspondait à mes qualités, mais surtout parce que c’était de nouvelles sensations, qui m’ont directement plu. L’adrénaline, la confrontation directe face à son adversaire… Tout ça me motive encore plus.

Quelles sont les qualités nécessaires pour performer dans l’escalade de vitesse ?

C’est vraiment très exigeant et complet. Il faut beaucoup de force et de gainage dans le haut du corps, mais aussi de l’explosivité et de la puissance dans les jambes. Il y a tout un travail technique pour réussir à aller le plus vite possible, mais aussi de coordination et de timing. C’est une des clés : savoir faire le bon geste au bon moment, avec force et précision. C’est pour cela que l’on passe beaucoup de temps au mur, sur la voie officielle. A l’échelle d’une semaine, je dirais que je passe six à huit heures à grimper, avec à côté quatre à cinq heures de musculation et de préparation physique. Une grande partie de nos entraînements sur le mur est consacrée à la recherche des meilleures prises, pour découvrir des façons d’aller plus vite. Une autre partie, c’est de la reproduction : répéter les gestes à vitesse de compétition, aller chercher les meilleurs temps possibles de manière régulière

« Une déception qui me donne encore plus faim »

L’an passé, vous avez remporté un titre important avec le classement général de la Coupe d’Europe. On peut dire que c’était une saison aboutie pour vous ?

D’une certaine manière, oui, car cela reste un titre. Toutefois, cette Coupe d’Europe était très spéciale, car ce n’était pas une saison complète. En raison de la pandémie, il n’y a eu que trois manches disputées en 2021. Et j’ai beau avoir gagné une manche, en plus en France [à Laval, NDLR], j’ai manqué la qualification pour les championnats du monde. Pour y être, il fallait remporter une étape de la Coupe d’Europe, mais avant les Mondiaux, et la seule que j’ai gagnée était disputée après. Or, je n’ai pu faire que 6e et 3e sur les deux premières manches. C’est une déception, mais qui me donne encore plus faim.

Quels sont les objectifs cette saison ?

Se frotter au plus haut niveau international en vue des Jeux olympiques ? Exactement. Mon objectif, c’est de me qualifier à chaque finale des manches de Coupe du monde sur lesquelles je serai engagée. C’est-à-dire, entrer dans le top 16. L’année dernière, je me suis classé 17e sur la seule manche que j’ai disputée. Je veux passer ce cap des 16 premières et être régulièrement à ce niveau. Au sein de l’équipe de France aussi, il faut faire ses preuves pour être sélectionnée, car il y a une vraie densité. C’est par les résultats au plus haut niveau international qu’il faudra aller chercher la qualif’, mais aussi la sélection. Ça sera très difficile, mais le sésame reviendra aux meilleures. C’est à Tokyo que l’escalade a fait sa première apparition aux JO.

En 2024, votre format de prédilection, la vitesse, aura sa place à part entière. C’est d’autant plus un objectif pour vous ?

Complètement. À Tokyo, la compétition était un format hybride entre les différentes épreuves : le bloc, la difficulté et la vitesse. Avec tout le temps que j’avais consacré uniquement à la vitesse, j’ai mesuré l’ampleur du chemin à parcourir pour redevenir complète sur toutes les disciplines et y être compétitive. Alors j’ai préféré rester focus sur la vitesse et préparer 2024. Avoir notre propre discipline représentée aux Jeux, c’est une énorme bouffée d’air. Avec les Jeux, tout était centré sur ce format hybride, et les spécialités comme la vitesse étaient plus délaissées. Maintenant, tout est revenu à la normale.

« Que les gens aiment notre sport, je n’en doutais pas »

L’escalade est donc récente au programme olympique, mais est-ce que les Jeux vous ont-ils toujours fait rêver ?

Avant l’arrivée de l’escalade, je ne pensais pas y être un jour. Venant de Savoie, je regardais beaucoup plus les Jeux d’hiver, avec le ski… Alors ça me paraissait lointain. Quand il y a eu cette annonce, ça a été un grand questionnement. C’est forcément un rêve, alors que ce soit possible d’y être avec ma spécialité, c’est exceptionnel. Je me suis directement dit : « j’y vais ! » En France, j’étais d’ailleurs la première de la vitesse à annoncer me lancer dans ce projet. Le fait que ce soit dans notre pays est d’autant plus motivant, et suscite encore plus d’engouement autour des athlètes qui visent les Jeux. Dans les sports amateurs et peu médiatisés comme nous, les Jeux, c’est un énorme boost. Cette apparition à Tokyo a donné beaucoup de visibilité à l’escalade et il y a eu des échos positifs. Que les gens aiment notre sport, je n’en doutais pas. Mais les JO sont la plus grande scène possible.

Sixième à Tokyo, la Française Anouck Jaubert a dit en interview que ces JO étaient la compétition où elle avait pris le plus de plaisir, parmi toutes celles de sa carrière. C’est inspirant pour vous ?

Oui, forcément. Anouck est une amie très proche, elle m’a beaucoup fait partager son ressenti quand elle était sur place. Pour elle, c’était une préparation très éprouvante, d’autant plus avec une blessure récente. Là-bas, elle s’est retrouvée sans sa famille, sans ses proches, et avec toutes les restrictions sanitaires dues au Covid. Alors si, malgré tout ça, elle dit qu’elle a vraiment adoré, c’est que ça signifie vraiment quelques chose. Savoir que c’est l’événement où elle s’est le plus éclatée, ça donne encore plus envie d’y être, c’est certain.