Jonathan Hivernat : « Une année exceptionnelle »

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Capitaine de l’équipe de France de rugby-fauteuil, Jonathan Hivernat revient sur son début d’année 2022, marqué par le titre européen avec les Bleus et le titre de champion de France avec Toulouse.

Jonathan, vous êtes champion d’Europe avec la France et désormais champion de France avec le Stade Toulousain. Quel regard portez-vous sur cette année 2022 assez incroyable pour vous ?

Je dois avouer que les derniers mois ont été à part, exceptionnels. C’est la concrétisation de toutes ces années d’entraînements, d’échanges, de sacrifices et de persévérance. Quand j’y repense, avec un peu de recul, c’est assez fou, au sein de mon club notamment. C’est le 10e titre pour le Stade Toulousain, avec un effectif arrivé à maturité. Le club dépasse les frontières de la région, le Stade Toulousain Handisport est désormais ancré comme un acteur fondamental qui met beaucoup de choses en place sur la thématique du handicap.

Concernant l’équipe de France, elle n’a jamais évolué à un tel niveau. Là aussi, il y a une certaine maturité et un groupe qui vit très sainement. Cette alchimie s’est créée très vite entre les joueurs, et j’éprouve donc une fierté toute particulière d’être le chef d’orchestre de cette équipe.

« Le XIII fauteuil va m’apporter du challenge »

Vous avez encore faim, puisque vous vous lancez dans le XIII fauteuil. Pourquoi cette nouvelle aventure ?

Ce nouveau défi est avant tout dans une optique de se préparer et de se donner beaucoup plus de matière. Aujourd’hui, le championnat, surtout en Elite 1, subit le fait de ne pas avoir assez de compétitions durant l’année. On essaye de tout optimiser, au niveau financier notamment, afin de rassembler les matches. Le championnat correspond donc à trois plateaux dans l’année, soit trois week-ends avec des matches. Dans deux semaines, nous aurons un tournoi international à Toulouse qui va réunir ce qui se fait de mieux sur la scène européenne et internationale. C’est un rendez-vous qui va nous permettre de jouer et de continuer à progresser.

Au milieu de tout ça, le XIII fauteuil va m’apporter du challenge. Je fais partie des joueurs qui sont les plus touchés. Beaucoup de joueurs ont plus de mobilité que moi au niveau des mains. Ça me permet donc de me confronter à meilleur que moi, de m’en inspirer et de pouvoir essayer de rivaliser. Ça fait partie des challenges qui me boostent, qui me poussent à continuer à vouloir progresser et m’inscrire dans le cercle des meilleurs joueurs au monde. Beaucoup pensent que j’en fais déjà partie (rires), mais j’ai envie de plus. C’est un objectif que je me suis fixé sur le plan individuel.

Votre jeu peut-il évoluer ? À quel point votre marge de progression est-elle encore importante ?

Aujourd’hui, beaucoup me disent que je suis arrivé à un tel niveau qu’il est difficile de faire plus. De mon côté, je pense que j’ai encore une marge de progression. Le nouveau coach qui est arrivé à Toulouse, qui a été entraîneur adjoint du Canada et sélectionneur de la Suède, met en place une vision de jeu qui m’aide beaucoup et qui me fait évoluer. Le Jonathan d’il y a deux ans a encore progressé, notamment tactiquement et sur l’optimisation des efforts durant un match. Cela me permet d’être le chef d’orchestre de l’équipe et de sublimer le jeu de mes partenaires. C’est extrêmement gratifiant, je suis au service du collectif et c’est une chose magnifique dans n’importe quel sport.

« Le sport est devenu mon mode de vie »

Pour Paris 2024, l’objectif sera l’or. Le titre européen rend t-il cet objectif plus réalisable ?

Depuis longtemps, on sait que cette génération-là peut faire quelque chose au plus haut niveau. Mais entre nourrir des espoirs et les concrétiser, il y a un monde. C’est tout nouveau pour nous ce qui nous arrive. Maintenant que le titre de champion d’Europe a été obtenu, il y a forcément beaucoup plus d’attentes autour de nous. Maintenant, on ne peut plus se cacher. Il va falloir rester au plus haut niveau mondial, et c’est ce qui va être le plus dur. On est à jamais les premiers d’avoir écrit cette belle histoire européenne. C’est quelque chose de fort pour la discipline.

Justement, est-ce un tournant qui va changer beaucoup de choses pour le rugby-fauteuil en France ?

Ça change forcément beaucoup de choses. Quand j’ai commencé, les seuls moyens pour découvrir la discipline étaient les clubs et les actions mises en place par le mouvement parasportif. Désormais, la démocratisation autour de la pratique est plus importante, mais aussi au sujet des sources d’informations. C’est un aspect fondamental pour le développement de notre sport. Beaucoup de gens, des jeunes notamment, ont pris conscience lors des championnats d’Europe qu’il est possible de pratiquer le rugby-fauteuil en compétition, à haut niveau. Le sport est un moyen de nous aider et d’enlever cette fragilité qui nous guette tous. Avec beaucoup de volonté, d’abnégation et une certaine forme de résilience, on peut être acteur de notre vie. Je pense que le sport est un élément fondamental. Dans mon cas personnel, le sport est devenu mon mode de vie.