Pauline Astier : « Nous avons conclu une sorte de pacte »

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Meilleure jeune joueuse de LFB la saison passée, championne de France et vainqueur de l’Eurocup avec Bourges, la Tarbaise de vingt ans rêve désormais des Jeux Olympiques de Paris, en 2024. Avec sa complice, la cycliste Marie-Divine Kouamé, elles se sont fait la promesse de les disputer ensemble.

Si tu devais établir un podium des meilleurs moments de cette saison 2021/2022…

En 1, je mettrais l’Eurocup. La finale était sensationnelle, l’ambiance au Prado juste exceptionnelle. En 2, c’est le titre de championne de France. Même s’il a été acquis à l’extérieur, ça reste un moment magique. Et puis en 3 la convocation équipe de France. C’était une totale surprise pour moi. J’étais avec les U20, j’ai reçu un email entre deux stages, je ne m’y attendais pas du tout.

Et la prolongation de ton contrat sur le parquet du Prado après la victoire contre Angers ?

Je l’avais presque oublié celui-là ! C’était génial, je ne m’y attendais absolument pas non plus. Ma famille était dans la salle en plus, ça ajoute une part d’émotion. Allez, je le mets en n°4…

Le seul point noir, finalement, est de ne pas avoir participé à la Coupe du monde en Australie…

Il y a aussi la défaite à l’Accor Aréna en finale de la Coupe de France après deux prolongations. Elle laisse encore aujourd’hui un fort goût d’amertume. La Coupe du monde, je m’y attendais un petit peu. Je m’étais blessée à une cheville deux jours avant l’annonce, je gardais bien sûr un petit espoir, mais je ne me berçais pas de trop d’illusions.

« J’avais les yeux grands ouverts »

Tu as dit à propos de ta première sélection à Marseille : « j’étais comme une petite fille qui arrive dans un magasin de bonbons »…

C’est exactement ce sentiment-là qui m’a animée lorsque j’ai rejoint l’équipe. Je connaissais toutes les têtes mais pas toutes les joueuses, même si l’on se croise souvent, à part bien sûr Sarah (Michel) ou Alix (Duchet), et j’avais les yeux grands ouverts à chaque seconde.

Quels souvenirs conserves-tu de ces quatre premières sélections ?

La première sélection à Marseille avec cette large victoire (87-52) à laquelle j’ai eu la chance de participer (6 points) reste un moment fort. Et puis aussi le match à Pau. Toute ma famille était là, et c’était assez émouvant de rechanter la Marseillaise dans un coin que je connais plutôt bien. Mais si je dois vraiment souligner un souvenir particulier, c’est tout le bien que ces sélections m’ont apportées.

Depuis la retraite de Céline Dumerc, en 2017, le poste de meneuse est largement partagé en équipe de France. Quels sont tes liens avec Céline ?

J’ai vraiment appris à la connaître cet été en sélection. Auparavant, on n’avait jamais vraiment eu l’opportunité de nous dévoiler.

Elle est comme toi née à Tarbes, a remporté ses premiers titres à Bourges… La comparaison est inévitable…

Beaucoup la font, même si nos palmarès sont incomparables. Petites, on a joué dans le même club, au même poste, puis il y a eu Bourges… Je comprends que l’on cherche à nous rapprocher. Mais je débute à peine…

« Je trouve cette concurrence motivante »

Pour revenir à ce poste de meneuse, il y a de nombreux profils en concurrence. Le clan des très jeunes avec Marine Fauthoux, Marie Pardon, toi, Leila Lacan, il y a Alix Duchet, Lisa Berkani, Caroline Hériaud, ou encore Olivia Epoupa, Marie-Eve Paget et Bria Hartley. Comment appréhendes-tu cette concurrence ?

Déjà, cet été, je ne pensais pas avoir l’opportunité de me poser cette question, mais c’est vrai qu’après y avoir goûté, on a tendance à se projeter un peu plus. Avoir autant de profils différents montre la richesse du vivier. Moi, je trouve cette concurrence motivante, mais je fais en sorte de rester moi-même, de jouer comme je sais jouer sans me poser d’autres questions. Il ne faut pas que cette concurrence devienne néfaste.

Tu as été retenue dans l’équipe pour affronter la Finlande puis l’Ukraine fin novembre. Des rencontres officielles cette fois…

Et je vais être très sincère, je ne pensais pas, cette fois non plus, être dans la liste. Je suis ravie, je travaille jour après jour pour mériter cette chance, mais ça reste une surprise de figurer dans le groupe.

Cet Euro en Israël et en Slovénie constitue-t-il un objectif pour toi ?

Pas forcément au début. Je le regardais d’assez loin, sans me projeter. Mais au fil du temps, oui, c’est devenu un objectif.

Quels sont, d’ailleurs, les rêves d’une joueuse de 20 ans désignée meilleure jeune joueuse de la Ligue féminine ?

Franchement, je ne sais pas trop comment répondre à cette question. Bien sûr, il y a Paris 2024. C’est encore loin, je suis encore jeune, mais je crois que c’est un rêve, au vrai sens du terme. Après, le meilleur chemin pour réaliser ses rêves, c’est de profiter de chaque instant, sans se poser d’inutiles questions et de toujours donner le meilleur de soi-même.

Paris 2024 dans un coin de la tête

On n’a pas deux fois la chance de participer à des Jeux Olympiques à domicile dans une carrière…

J’ai une amie, Marie-Divine Kouamé, avec qui nous avons conclu une sorte de pacte : participer ensemble à Paris 2024. Bon, elle vient d’être championne du monde de cyclisme sur piste, et elle a un temps d’avance sur moi, et elle disputera sûrement ces Jeux Olympiques. Moi, je l’espère sincèrement. Cette promesse est motivante en tout cas.

Revenons-en à ce début de saison à Bourges. Déjà, comment se sont passés les premiers contacts entre Alix Duchet et Yvonne Anderson ?

(Rires) Je n’étais pas là, mais ils se sont très bien passés.

Plus sérieusement, évoluer cette saison au côté d’une joueuse expérimentée comme Yvonne Anderson est-il un avantage ?

C’est vraiment trop bien. Elle joue poste 1 et 2. Moi c’est pareil, et au fil des matches, nous nous découvrons une complémentarité super intéressante. Nos jeux sont complètement différents, mais j’apprends vraiment beaucoup à son contact, à l’entraînement, en match.

« J’ai quand même un certain aplomb »

L’effectif de Bourges est composé de joueuses d’expérience. Que penses-tu pouvoir amener à cette équipe ?

Un peu de fougue peut-être. Des fois, elles sont dans le bon timing, prennent les bonnes décisions, d’autres fois il faut un peu de folie. Mais je ne me dis jamais : là, tu dois te comporter ainsi, amener de la vitesse, accélérer, c’est juste naturel, c’est mon jeu qui est ainsi.

Avec cette fameuse vitesse, ta fraîcheur, tes fulgurances, on te qualifie souvent de joueuse moderne, avec un gros QI basket. Tu valides ?

Si l’on me voit ainsi, c’est que mon QI basket prime sans doute sur mon physique. Jeune, j’ai appris beaucoup de choses au côté de Laure Savasta, qui était ma coach à l’académie. J’ai enregistré, les différentes joueuses que je côtoie depuis, les différents coaches, m’aident à développer encore ces savoir-faire.

On dit aussi que tu as beaucoup de culot…

Je ne sais pas trop. Un peu peut-être. Enfin si, j’ai quand même un certain aplomb dans mon jeu.

Que tu sais saisir les opportunités…

Ça oui. Les premières années, on ne joue pas beaucoup, et il faut savoir rentabiliser chaque opportunité, jouer juste, défendre comme il faut.

Quels sont les domaines dans lesquels tu dois encore progresser ? La dureté défensive ?

Plus dans la dureté défensive, oui, que la défense elle-même. Il faut que je travaille beaucoup de choses en fait, mon aisance dans le jeu par exemple, mais le travail physique est le chantier n°1. Je me rends-compte par exemple qu’il y a un monde d’écart avec l’Euroligue. Mais je ne me fais pas de soucis parce que je suis bien entourée.

Pour finir, comment ta maman a-t-elle vécu l’épopée européenne de la saison passée, 26 ans après avoir remporté la Coupe Ronchetti avec Tarbes ?

Au départ, je ne savais pas que c’était la même compétition. Sincèrement, c’est cool de partager ça avec sa maman. Et au-delà avec toute sa famille. Mes parents n’avaient pas pu venir pour la finale, mais mes grands-parents étaient là. C’était quelque chose pour eux aussi.

Après un exercice aussi faste, que peut-on te souhaiter aujourd’hui ?

Juste de rester en forme, de ne pas me blesser.

Propos recueillis par Philippe Pailhories