L’Hexacup, une façon différente de pratiquer le foot

©️ Hexacup

Actuellement étudiant en Master Entreprenariat à l’IAE de Bordeaux, Guillaume Cazcarra a fondé l’Hexacup à l’été 2020. Un tournoi de foot, avec l’objectif de rendre la pratique plus accessible et plus écologique. Deux ans après la création de cette compétition, le projet prend désormais une ampleur nationale, avec la volonté de le pérenniser.

Fan de foot, Guillaume Cazcarra a lancé l’Hexacup en 2020 afin de rassembler les jeunes âgés de 15 à 25 ans autour du foot à 8. Entre enjeux sportifs, écologiques, développement national de cet outil et la volonté de rendre le projet pérenne, le jeune homme âgé de 20 ans revient sur cette aventure, débutée à l’été 2020.

Comment a été créée l’Hexacup ?

Guillaume Cazcarra : J’ai fondé l’Hexacup en 2020 à la sortie du premier confinement. C’était à la fois le pire et le meilleur moment. Le pire, parce qu’on n’avait pas le droit de jouer au foot à plusieurs. Le meilleur parce qu’on avait tous envie de sortir de chez soi ou sortir faire du sport. Dès lors, on a commencé à créer une compétition en jouant presque de manière clandestine un peu partout, à l’été 2020, avec un principe très simple : c’est du foot à huit contre huit. Les participants peuvent créer leur équipe librement, avec leur nom, leur logo, leur maillot et ensuite affronter des équipes en autonomie sur le terrain et l’adversaire qu’elles veulent. Les deux équipes s’arrangent, jouent leur rencontre et nous indiquent le score à la fin. Les rencontres durent deux fois 30 minutes.

Je n’avais que 18 ans lorsque j’ai lancé ce projet. Je ne me retrouvais ni dans l’offre de la FFF en tant que licencié d’un club, ni dans le sport scolaire, que ce soit au lycée ou à l’université. L’idée que j’avais de l’Hexacup état d’en faire une compétition qui soit gratuite, accessible à tous, donc pour tous ceux qui n’ont pas forcément les moyens, le temps ou l’envie de jouer en club et qui préfèrent jouer entre amis de façon beaucoup plus libre, plus décontractée et avec un niveau plus ou moins relevé : on s’est dit que l’Hexacup pourrait être une bonne idée. On s’est créé à Bordeaux avec l’ambition de proposer une compétition dans laquelle tout le monde peut jouer et nous avons bien progressé.

Quelle est la progression du tournoi depuis ces deux dernières années ?

GC : On a atteint 60 équipes inscrites à Bordeaux lors de la saison 2020-2021. A la suite du succès rencontré à Bordeaux, je me suis dit : « bon, pour que le projet soit utile, il faut qu’il soit partout en France pour qu’un jeune, quelle que soit sa ville de résidence, puisse jouer des matches en bas de chez soi, créer son équipe et peut être se qualifier pour un tournoi national à Paris, qui oppose des équipes de toute la France. »

« J’aurais dû lancer l’Hexacup il y a quelques années déjà »

60 équipes ont rejoint l’aventure à Bordeaux lors de la saison 2020-2021. Qu’est-ce que vous avez ressenti quand vous avez vu cet engouement soudain dans votre ville ?

GC : Je me suis dit que j’aurais dû le créer déjà il y a quelques années, parce que s’il y avait autant d’engouement dès le départ, c’est qu’il y a une vraie demande et que plein de jeunes qui, aujourd’hui, ont juste envie de jouer entre potes. Certains n’ont pas le temps de se rendre à l’entraînement du mercredi en raison des études avec un emploi du temps changeant. Je me suis dit : « mais oui, c’est ça qu’il fallait faire depuis longtemps. » Avoir vu 60 équipes faire partie de l’Hexacup à Bordeaux et les jeunes kiffer entre potes, c’est à ce moment que je me suis dit : « Bon, ben le projet est trop beau, c’est trop utile pour qu’on le limite à Bordeaux. Il fallait qu’on l’implante partout en France car il y a une utilité sociale trop importante pour se limiter. »

Lors de la saison dernière, on est allés à Lille, Toulouse et Paris en plus de Bordeaux. On a commencé un peu à élargir le tournoi et l’implanter. Cela a très bien marché, même si nous avons rencontré quelques problèmes avec l’application, qui devait sortir pour faciliter l’organisation des matchs pour les joueurs, rendre la pratique utilisateur assez sympa. Il y a eu du retard. Nous avons aussi eu du mal aussi à exporter le modèle. Quand tu fondes un tournoi dans ta ville mais que tu veux l’exporter dans d’autres communes, ce n’est pas la même chose mais finalement ça a bien fonctionné. Et puis cette année, c’est l’année de la confirmation. On essaie d’être présent dans toutes les villes. Il commence à y avoir des équipes à Bayonne, Nice, à Angers, à Amiens, à Strasbourg, à Marseille, à Nantes.

La création de ce projet est-elle aussi un moyen de maintenir la pratique sportive chez les jeunes ?

GC : Totalement. On s’aperçoit que les jeunes restent de plus en plus longtemps chez eux et devant leurs écrans. Cela va être cliché mais quand j’étais petit, ma mère m’engueulait pour que je rentre à la maison. Aujourd’hui, ma mère engueule mes petites sœurs parce qu’elles sont trop sur leurs écrans. Donc c’est dur aussi, car il y a des avantages. Grâce aux écrans, nous avons monté une appli, on ne pourra pas dire l’inverse. Mais l’Hexacup permet à ces jeunes de sortir de chez eux et d’être moins figés devant leurs écrans. D’abord, parce que tu crées ton match en un instant. Tu n’as pas besoin de t’organiser pendant un mois pour aller jouer ton match de foot. Et puis comme en fait c’est tous niveaux confondus, tu as des équipes avec des mecs qui auraient presque pu devenir pros il y a trois ans, ils sont défaits. Et puis il y en a pour lesquels tu te demandes depuis combien de temps ils ont pas touché un ballon, mais c’est cela qui fait un peu le romantisme du truc, c’est tout l’ADN du foot amateur qui est réuni dans l’Hexacup avec des jeunes qui ne sont pas forcément forts, qui n’ont pas l’habitude de jouer en club ou qui ne jouent pas au foot tout court, ils sortent de chez eux, ils passent un bon moment avec leurs potes gratuitement. C’est un peu l’état d’esprit et l’ADN qu’on a tenté de donner au projet.

« C’est grâce aux bénévoles que le projet a pu dépasser les frontières bordelaises »

Comment la stratégie de développement s’est mise en place à partir de la saison 2021-2022 ?

GC : On s’est dit qu’après avoir fait un truc à Bordeaux qui marche bien, il fallait qu’on arrive dans de nouvelles villes d’un pays. Nous n’avions pas de budget, pas de réseau, on avait à peine signé un partenariat avec les Girondins de Bordeaux, qui nous soutiennent un petit peu financièrement et surtout avec des places pour les jeunes qui viennent à nos actions écologiques. Je me suis demandé par la suite comment faire pour aller dans d’autres villes ?

Finalement, nous avons échangé sur les réseaux sociaux avec des jeunes qui connaissaient l’Hexacup. Dès lors, on a beaucoup travaillé à l’été 2021 pour tenter de constituer un staff. Dans chaque ville dans laquelle la compétition était présente, trois à cinq jeunes bénévoles entre 18 et 20 ans avaient pour objectifs d’implanter le tournoi dans leur ville, d’en parler autour d’eux, d’être à l’écoute des équipes qui ne savaient pas trop comment se créer, comment l’initiative fonctionnait. C’est grâce à ces jeunes bénévoles que le projet a pu dépasser les frontières bordelaises.

Quelle est la structuration du projet actuellement ?

GC : Cette année, nous avons deux alternants recrutés en septembre. L’un qui s’occupe de la communication, tandis que le second est en charge de la partie sportive. Ensuite, on a quatre stagiaires qui sont déjà là ou qui vont arriver à partir de janvier. Qui donc s’occupent du sponsoring, du juridique pour certains, en plus du sportif pour d’autres. Nous comptons plus de 20 bénévoles, ce qui fait une équipe de 25 personnes. Les bénévoles vont s’occuper de rechercher des partenaires, d’échanger avec les équipes pour répondre à leur demande, pour s’occuper de l’application quand il y a un problème etc.

« On a une sorte de responsabilité à faire grandir le projet »

Deux ans après la création du projet, 2500 joueurs et près de 900 matchs qui ont eu lieu l’année passée entre Bordeaux, Lille, Paris et Toulouse. Que ressent-on ?

GC : Nous avons dépassé le cap des 4 000 utilisateurs. C’est une superbe sensation mais ça nous met tout de même la pression car c’est trop prometteur pour que l’on rate. On a une sorte de responsabilité à faire grandir le projet. Il y a des jeunes qui nous contactent dans toute la France pour qu’on arrive à Nantes, pour qu’on arrive à Strasbourg, même parfois dans des petites villes comme Belfort, on a même plein d’équipes belges qui nous ont contactés. On a créé une antenne à Bruxelles pour que les Bruxellois puissent commencer à jouer au foot. Les premiers matchs en Belgique commencent. Je ne parle même plus de responsabilité, on a vraiment créé quelque chose. Il faut absolument que ça fonctionne pour que les jeunes continuent de rêver, continuent de s’éclater. Quand j’avais 13/14 ans, je jouais au foot petit parc à côté de chez moi où j’étais fourré le samedi de 8 h à 20 h. On ne passait pas forcément notre temps dans les clubs. Quand t’es passionné, tu peux jouer n’importe où, n’importe quand. A ce moment, tu te dis que tu joues sur le terrain situé en bas de chez toi et peut-être que si je me qualifie pour les phases finales de l’Hexacup, je vais jouer un tournoi national contre d’autres équipes à Paris avec des maillots sur lequel le logo de l’équipe sera brodé.

On a envie que ce projet parle au plus grand nombre de jeunes possibles et qu’il grandisse. Plus concrètement, on ambitionne d’implanter le tournoi dans 20 grandes villes françaises. L’année suivante, l’objectif sera de consolider notre présence dans certaines communes. Et puis, à terme, l’enjeu serait de s’adresser à d’autres pays. On a des habitants du Luxembourg, de Suisse, de Belgique et d’Italie qui nous sollicitent pour que l’on installe l’Hexacup. C’est fou. Il faut faire les choses dans l’ordre, étape par étape, en réussissant les défis d’aujourd’hui, c’est-à-dire que l’application fonctionne correctement, que les matches se déroulent bien, grandir dans les villes dans lesquelles on commence à bien s’implanter et réussir nos enjeux écologiques.

Pourquoi avoir voulu inclure la question écologique à travers le foot ?

GC : C’est un projet qui repose sur deux piliers : le sport et l’écologie. Moi, qui suis un passionné de foot depuis toujours, le but de créer cette compétition de foot était logique. Quand j’étais jeune, j’avais essayé de créer des projets en lien avec l’écologie. C’était difficile en fait de convaincre des jeunes de s’investir, de se lever à 10 h pour aller faire des actions. Lorsque j’ai créé l’Hexacup, je me suis dit que c’était une façon idéale en fait d’utiliser le sport comme levier pour enfin réussir à engager la jeune génération qui est sensibilisée et qui n’est pas toujours simple à engager. De la sensibilisation à l’action, il y a souvent un pas et l’objectif de l’Hexacup est de les aider à faire ce pas en participant à des actions écologiques afin de pouvoir participer aux play-offs de fin d’année. On a mené des actions de ramassage de déchets à Bordeaux, qui avaient réuni 300 jeunes avec l’association The Sea Cleaner.  Cette année, on va lancer l’HexaClean Day, qui se tiendra en simultané dans les grandes villes de France le 13 mai prochain. De plus, l’année dernière, les équipes commandaient des maillots fabriqués en Chine ou au Bangladesh. Cela n’avait pas de sens si on voulait limiter l’impact environnemental. Donc on a commencé à parler avec une start-up niçoise qui s’appelle Nolt et qui récupère des bouteilles en plastique dans la Méditerranée et qui fait des maillots 100 % recyclés. On s’est dit que c’était une super idée. En revanche, le maillot coûte 46€ pour une pièce. Notre but est de rendre le projet accessible. Après négociations, ils ont accepté de fixer le prix du maillot à 21€. Dès lors, un jeune peut se procurer un maillot à ce tarif avec son nom, numéro de maillot et le logo, tout en faisant une bonne action pour la planète.

On parlait d’internationalisation tout à l’heure. Mais avant ça, l’enjeu sera de pérenniser l’Hexacup à l’échelle nationale ?

GC : Complètement. Tout à l’heure, on parlait d’internationalisation, mais pour le moment, on est pleinement concentrés sur la France. Notre promesse, c’est de tout faire pour qu’un jeune en France puisse télécharger l’Hexacup et jouer un match en bas de chez lui. Si déjà, on réussit cet enjeu, ce sera un immense succès. On aura quand même la satisfaction d’avoir aidé les jeunes à jouer au foot partout dans le pays et d’avoir un peu révolutionné le foot amateur pour les jeunes. Ce sera une grande satisfaction. Cela va demander beaucoup de boulot, comme améliorer l’application. Ça va demander de faire un gros boulot pour implanter le projet partout en France, d’aller chercher des partenaires pour organiser des tournois nationaux durant la période estivale. De grands défis nous attendent. Mais si on y arrive, on aura eu un gros impact sur la pratique sportive pour les jeunes en France, donc c’est vraiment là que se situe notre ambition à court et moyen terme.