Xavier Thévenard : « Transmettre des messages grâce au sport et à l’écologie »

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L’Ultra-runner Xavier Thévenard, triple vainqueur de l’UTMB, s’est confié à SPORTMAG sur sa course, l’écologie dans le sport et l’importance de la MAIF dans cette cause, avant de parcourir l’Île-de-France de mercredi à vendredi pour sensibiliser à la cause écologique.

Xavier, comment est venue l’idée de parcourir l’Île-de-France en courant, en pédalant et en ramant ? 

Il faut savoir que je suis ambassadeur Sport Planète pour la MAIF. Actuellement, les Etats Généraux se tiennent au CREPS Île-de-France à Châtenay-Malabry (Hauts-de-Seine). C’est un groupement de plusieurs acteurs du milieu du sport, des clubs et des fédérations. L’idée de ces Etats Généraux, c’est parler de l’éco responsabilité dans le milieu sportif à travers des conférences, des débats, des ateliers. Etant donné que je suis l’ambassadeur de Sport Planète, on avait dans l’idée de réaliser un tour de l’Île-de-France de 250 km pour justement montrer qu’il y a encore des corridors écologiques, des voies vertes, sans passer par des endroits très urbanisés, avec beaucoup de macadam, et que la possibilité de se déplacer en courant, en vélo ou en kayak existe. Cela sert aussi à montrer qu’il existe encore des zones de nature à protéger à proximité de la région Île-de-France. Etant un amoureux des longues distances, c’est l’occasion idéale pour moi de clore un petit peu ces Etats Généraux et montrer aussi qu’il est possible de parcourir un certain nombre de distances qui nous amènent d’un point A à un point B en courant, en pédalant ou en ramant. En l’occurrence, le point A, c’est le CREPS Île-de-France, tandis que le point B, c’est l’INSEP. Des associations sportives ainsi que des écoliers m’accompagneront durant ce défi. Une belle balade nous attend.

Vous êtes plutôt habitué aux longues distances avec des parcours assez sinueux, pentus. Quelle va être la difficulté, selon vous, sur ce parcours ?

Ce qui va être différent, c’est peut être le fait que ce soit un peu plus plat, moins vallonné, sans oublier la variation des pratiques. C’est différent. Ce n’est pas exclusivement du trail, cette épreuve comporte également une partie VTT et une partie kayak. Si ça n’avait été qu’un parcours réalisable à pied, cela m’aurait peut-être troublé en raison de la monotonie. Mais là, il y a différentes activités. Et puis je ne connais pas trop les endroits que l’on va traverser. Je connais le parcours qu’on fait mais je ne connais pas la nature et les chemins de ces lieux. Ce sera un peu la découverte au fur et à mesure qu’on avance. La difficulté principale, à mes yeux, sera finalement le faible dénivelé et la diversité de parcours que j’emprunte lors de mes entraînements.

Vous évoquiez des rencontres avec des écoliers qui vont avoir lieu lors de ce défi. Comment ça va se passer ?

Ça va se passer à proximité de certaines écoles. Un moment d’échange aura lieu. De nombreux thèmes seront abordés tels que l’écologie, le dépassement de soi et le goût de l’effort qui, je pense, sont des valeurs importantes de nos jours. Si on connaît des difficultés aussi bien dans la vie que dans le sport, je considère que grâce à cela, on arrive à mieux se dépatouiller dans la vie quotidienne. Cela forme notre caractère. Et puis quand il y a un truc qui ne tourne pas bien dans le quotidien, on arrive à s’en défaire plus facilement.

« On va peut-être tendre vers 2,4°C supplémentaires » 

On connaît votre investissement pour l’écologie. Où en est-on entre écologie et sport ? Et quels vont être les prochains enjeux ?

Il y a plein de questions qui gravitent autour de ça. C’est une très bonne question parce que moi, ce qui m’intrigue en fait, c’est de savoir quelle sera la place du sport dans notre société. Est-ce que ça sera quelque chose qui sera encore un peu médiatisé ou pas ? Est ce qu’il n’y aura pas d’autres sujets plus importants à traiter ? Parce que la crise écologique sera tellement plus importante que finalement, le sport que l’on pratique pour le loisir, pour sa santé, pour le bien-être. Mais est-ce qu’il est encore une priorité dans notre société ? Si, comme le GIEC, nous annonce que d’ici à la fin du siècle, on est à +2°C. +2°C pour certaines personnes, ça ne paraît pas grand-chose. On porte une doudoune et hop. Mais, en fait, c’est plus compliqué que ça en a l’air. Et les +2°C, c’est depuis les niveaux préindustriels, donc c’est énorme la rapidité à laquelle la planète se réchauffe, ce qui engendre pas mal de perturbations au niveau de la biodiversité, de la faune, de la flore. On est directement impliqué dedans, puisque l’espèce humaine fait partie de ce milieu-là. On a bien vu ce que ça a donné cet été avec les sécheresses et les canicules. L’agriculture a grandement été affectée. La température a grimpé de 1,2°C depuis le niveau préindustriel. On va vers les deux degrés. Après que le GIEC ait revu ses prévisions, on va peut-être tendre vers 2,4°C supplémentaires.

« Une bonne tendance de fond chez les jeunes, notamment sur le sujet de l’écologie »

Dès lors, comment parvenir à concilier sport et environnement ?

Je vois que le sport m’a fait grandir en tant qu’individu. Grâce à cela, je me contente de choses plus simples. C’est là où son rôle est important dans l’éducation. Parce que finalement, on prend une paire de baskets, on prend son vélo, on va se dépenser. On n’est pas obligé d’aller consommer dans le centre commercial. Pour les déplacements aussi, c’est top parce que les déplacements, c’est aujourd’hui un domaine dans lequel beaucoup de gaz à effet de serre sont émis. Si on dispose de cette éducation et cette culture du sport, on va se déplacer au boulot à pied ou à vélo. Et c’est là où je me dis que, finalement, le sport a un rôle important. Je sais que le sport, c’est un bien-être, c’est une culture, c’est un mode de vie. Et puis il y a des à côtés, il n’y a pas que le physique. Il y a aussi tout ce qui tourne au niveau de l’alimentation. Et c’est vrai que les gens sportifs aiment bien prendre soin d’eux et privilégier l’alimentation bio. Et ça, se nourrir de manière bio, avec peu de pesticides, local et de saison, c’est bon pour l’empreinte carbone.

Est-ce que vous sentez que les jeunes sont de plus en plus impliqués dans l’écologie ?

D’après ce que j’entrevois de mon côté, oui. J’espère ne pas être dans un autre monde. Parfois, je me questionne « Est ce que je ne suis pas dans un microcosme ? », dans lequel finalement, tout le monde a compris et passe à l’acte. Il est difficile de connaître le pourcentage des personnes qui pensent que ce n’est pas un réel problème chez les jeunes ou chez d’autres, qui pensent qu’il faut que quiconque prenne conscience qu’il y a un gros problème de dérèglement climatique. C’est dur à savoir, mais en tout cas, des jeunes que je croise, j’ai l’impression qu’il y a une bonne tendance de fond, qu’il y a une prise de conscience. Après, entre la prise de conscience et le passage à l’acte, il y a un écart.

Comment avez-vous eu cette prise de conscience ?

Je suis originaire du Jura, où la nature était luxuriante. Avec mes parents, mes frères et ma sœur, c’était un lieu assez rural. Et puis on s’amusait dans les bois pour aller voir le premier copain qui habitait à une dizaine de kilomètres. On s’amusait toute la journée à jouer aux cow-boys et aux Indiens dehors dans la nature, à se planquer dans les arbres. Mes frères, ma sœur et moi avons baigné dans cet univers. Mes parents comprenaient les interactions qu’il y avait entre nous, l’espèce humaine et puis le milieu naturel et la préservation de la biodiversité. Ma conscience écologique est arrivée assez naturellement lors de mon adolescence en me documentant dessus. Pour ma part, je pensais être un honnête citoyen en faisant mon tri sélectif, en me déplaçant à vélo et en consommant peu de viande. Je ne remets pas ça en cause. Je trouvais ça bien mais pas suffisant. De plus, je me déplaçais aux quatre coins du monde en avion pour participer à des trails. Désormais, je n’utilise plus l’avion par choix écologique. Par exemple, quand on prend un avion, on fait un aller-retour. Paris-New York, c’est 2,5 tonnes de CO2 émises. Si on veut atteindre la neutralité carbone d’ici 2050, il faudrait que tous, nous autres individus, on soit à deux tonnes de CO2 par an et par personne. Même si je fais tout bien au quotidien, un aller-retour Paris/New-York suffit pour atteindre le quota de CO2 annuel.

Pour l’intérêt général et pour que la vie puisse perdurer sur Terre, j’ai envie d’avoir des actes forts et ça passe automatiquement par ça. Et je ne peux pas forcément prôner à travers mes réseaux l’écologie sans avoir des actes forts. Mon but, c’est de continuer à pratiquer ma discipline de façon saine, me faire plaisir et d’arriver à ces deux tonnes de CO2 par an par personne.

« Nous, sportifs, pouvons transmettre des messages importants » 

Quelle est l’importance de la MAIF dans ce challenge ?

Ils mettent en place de nombreux projets en place pour sensibiliser les écoles aux dangers du dérèglement climatique. En tant qu’ambassadeurs Sport Planète avec d’autres sportifs, il est primordial de créer une communication autour de la MAIF, de leur sensibilité puis de leur soutien dans cette cause. Et c’est vrai que nous, les sportifs, on est plutôt bien vus, on est assez audibles et du coup, par notre intermédiaire, on peut arriver à transmettre des messages importants pour une noble cause qui a du sens pour un avenir plus serein et clair. Le sport et l’écologie vont bien ensemble. C’est vraiment des domaines dans lesquels je trouve qu’il y a beaucoup de valeurs communes.

D’autres événements avec MAIF sont-ils prévus dans les mois à venir ?

On réfléchit un peu chaque année sur ce qu’on va mettre en place comme actions. L’écologie, ce n’est pas seulement un domaine. On parle de sensibilisation des écoles sur ces problématiques-là, mais on peut vraiment aller plus loin dans le domaine qu’on veut. Pour le moment, je ne sais pas trop, mais on va y réfléchir durant le Tour d’Île-de-France mercredi, jeudi et vendredi.