Violences dans le sport – Lauriane Gros : « Il existe une forme d’omerta »

Depuis 2019, la Ligue Hand région Sud mène des actions contre la violence dans la discipline. La présidente de la commission prévention des violences, Lauriane Gros, a pris le temps de nous éclairer sur les violences dans le sport parfois méconnues.

 

Le sport n’est pas vu par le grand public comme un vecteur de violences. Pourquoi est-ce pourtant le cas ?

Ce n’est pas perçu comme ça par le grand public, c’est vrai. Mais comme dans tout milieu, il y a de la violence, le sport n’est pas protégé. Comme dans toute structure il peut y avoir du harcèlement moral et toutes autres formes de violence. Le sport est le reflet de la société et n’échappe donc pas à la violence.
 

Qu’est ce qui favorise cette violence dans l’environnement sportif ?

Il y a un point parmi d’autres qui peut favoriser la violence, c’est notamment la compétition. Celle-ci peut exacerber les tensions. Mais les violences sont importantes, par exemple envers l’arbitre. La promiscuité est également importante dans le sport avec les vestiaires, les douches, vous pouvez être très proches et cela favorise les violences.
 

Depuis 2019, vous menez des actions contre les violences au sein des structures handball. Quelles sont-elles ?

Depuis l’année dernière, nous développons quelques principes, avec un partenariat avec France Victimes et Colosse aux pieds d’argile. Nous désignons des référents, mettons en place des sanctions disciplinaires. On évolue sur différentes violences comme le cyber-harcèlement. Il faut savoir qu’il y aussi l’attestation d’honorabilité, tous les encadrants doivent attester d’avoir un casier vierge au niveau des violences sexuelles.
Avant 2019, on avait entamé des réflexions sur la violence. De fil en aiguille, on a creusé et on s’est rendu compte qu’il y avait des violences dans le monde du handball. En région Sud, on a donc décidé de créer une commission, on est la seule Ligue à le faire en France. Elle a pour rôle de faire de la prévention. Cela sert notamment aux clubs qui peuvent nous appeler pour un rôle de médiation, on va intervenir sur la structure où s’est passé l’événement. Le vrai volet de notre commission c’est la prévention, on est un relais vers les associations ou les autorités compétentes.
 

Le 8 mai dernier, la Ligue a organisée un webinaire contre les violences. Quelles sont les actions qui vont en découler ?

Ce webinaire a été organisé à l’initiative d’Avignon Handball. Il était ouvert à tout le monde, même aux non licenciés. Le matin était dédié à la sensibilisation avec notamment Colosse aux pieds d’argile. Le comité Vaucluse Rugby est aussi venu présenter son plan, le président du CDOS est également intervenu. L’après-midi était dédiée à des travaux en atelier, on voulait faire réfléchir les gens sur des périmètres qui englobent différentes violences et problématiques. Tout cela va alimenter ma réflexion et un plan d’action que je vais dévoiler à la rentrée.
La réflexion était assez intéressante puisque les participants ont pointé une certaine forme d’omerta qui pouvait être un frein à la libération de la parole dans certains clubs. Il doit y avoir une vraie sensibilisation des acteurs, il ne suffit pas d’agiter la menace judiciaire, car certains peuvent se dire « ça ne nous concerne pas ». Paradoxalement, le sujet est plus actuel, petit à petit ça commence à sortir, le climat est favorable, les acteurs se multiplient mais ce n’est pas facile non plus parce qu’on ne sait plus vers qui se tourner pour les victimes. Les structures doivent se parler, pour se coordonner. Les acteurs du sport doivent se saisir du sujet.
 

On peut vous contacter si on est victime de violence. Très concrètement, comment cela se passe ?

Au niveau local je peux être contacté par des victimes, mais ce n’est pas mon métier. En revanche, je vais récupérer sa parole et faire un lien avec les associations car ce sont elles qui ont l’expertise. C’est une solution complémentaire. Le but c’est aussi d’avoir des référents physiques pour être sur le terrain, faciliter la parole et être plus facilement au fait des violences.
 

En chiffres, que représentent les violences dans le handball ?

On ne dispose pas de chiffres concrets. J’aimerais bien justement, en lien avec la fédération et l’association Colosse aux pieds d’argile, faire un sondage sur les Pôles Espoirs, par exemple, pour avoir un échantillonnage sur les violences, parce que nous n’avons pas de données. Mais il y en a bien plus que ce que l’on pense.

Propos recueillis par Alexandre Pastorello