Sport santé : Issy-les-Moulineaux se prend au jeu

La ville d’Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine) met l’accent depuis plus de neuf mois sur la promotion de son dispositif de sport santé afin d’intégrer ses habitants éloignés de la pratique sportive pour cause de maladie ou d’isolement. De nombreuses personnes ont répondu présent et les premiers résultats sont encourageants pour la suite.

 
Issy, c’est le sport santé ! La commune francilienne fait figure de véritable locomotive dans l’élaboration de ce dispositif de santé, bien-être et insertion sociale. Depuis avril 2019, la ville des Hauts-de-Seine, incarnée par son maire André Santini (UDI), s’organise pour attirer le maximum d’habitants qui s’en sont éloignés, vers le sport.
 

« Remettre ces personnes dans le giron sportif »

 
« Le principe est de toucher toutes les personnes qui se retrouvent en dehors du giron sportif », explique Vincent Richert, directeur administratif et financier de l’Office municipal des sports et l’un des principaux artisans du projet. « À Issy-les-Moulineaux, nous avons 12 000 pratiquants licenciés dans les clubs. Nous en avons au moins le double qui fait du sport indépendamment, comme celles et ceux qui vont courir dans les parcs par exemple. Mais nous avons toute une frange de la population qui ne fait pas de sport du tout, c’est à dire moins d’une fois par mois, soit pour des soucis de santé, soit par manque de volonté, voire par réticence à rejoindre un club. Notre volonté était donc de mettre en place ce système pour les remettre dans le sport. » Le dispositif est plutôt simple. Les Isséens et les Isséennes souhaitant adhérer à ce programme viennent à l’Office municipal des sports pour y remplir un formulaire d’une vingtaine de questions. Elles sont ensuite orientées vers l’Espace Santé Simone Veil, où elles feront un examen clinique durant lequel le médecin établira un bilan de santé sur l’aptitude à la pratique, le mode de vie quotidien et les habitudes alimentaires. Le tout avant de recevoir un certificat médical de non contre-indication à la pratique d’un sport. C’est à l’issue de ce parcours qu’un éducateur sportif est mis à disposition. « Nous nous occupons de plusieurs profils », décrit Kamel Saïdani, éducateur sportif et professeur d’arts martiaux de la ville. « Cela peut aller des personnes ayant subi une longue maladie, aux personnes souffrant d’obésité, en passant par les grosses blessures. Nous adaptons chaque programme selon les cas. Au-delà de l’activité physique, nous travaillons énormément sur le mental. Par exemple, je m’occupe d’une femme ayant subi un cancer du sein qui était très réticente et en déchéance. Elle a énormément évolué depuis le début de son programme. » La ville rappelle sur son site internet que le « dispositif est totalement gratuit pour le bénéficiaire grâce au soutien de l’association sportive ASEP-GI (Association sportive éducation physique – Gymnastique isséenne, NDLR), pendant une durée de 6 mois à hauteur d’une heure par semaine d’activité physique. À l’issue des 6 mois, l’éducateur sportif et le bénéficiaire feront un bilan sur les apports et bienfaits de ce dispositif, afin d’encourager la poursuite de la pratique d’une activité physique en autonomie dans un club ou une association, une salle de remise en forme… »
 

 

Un rôle de développeur personnel

 
Accompagnée par cet éducateur sportif, une personne pratiquant l’activité physique peut ainsi progresser à son propre rythme. « Nous leur organisons ce cours particulier en fonction de leur disponibilité, des places sur les installations sportives », détaille Vincent Richert. « Dans un premier temps, nous partons sur une activité douce comme du stretching. Il y a une dizaine de séances étalées sur quatre mois, ce qui représente deux, trois séances par mois. » Éloignée du sport à cause d’une longue maladie, Sylvie R. a tenu à participer à ce programme et se réjouit des bénéfices sur elle. À 50 ans, elle retrouve la passion de la pratique physique. « J’en suis ravie », sourit l’habitante. « J’ai été sélectionnée il y a six mois, car je remplissais les critères. J’ai toujours été une personne sportive, mais ma maladie m’a stoppée. J’ai été prise par la main grâce à une activité adaptée à ma situation. Je suis ce cours particulier une fois par semaine. Actuellement, je fais de la musculation, mais je vais me diriger vers une pratique sportive comme le tai-chi alliée à de la sophrologie. » Au-delà de l’activité physique mise à disposition de la pratiquante, le dispositif joue également le rôle de développeur personnel chez des personnes qui peuvent moralement être en difficulté. « Le fait d’être accompagnée permet de prendre confiance en soi », souligne Sylvie. « Avant moi, j’ai vu une personne avec un problème de poids qui se trouve de plus en plus en forme. Pour le moral, le sport santé guérit les bobos ! C’est une formule hyper séduisante. » Cette formule a permis d’attirer une cinquantaine de personnes dans ses filets avant l’été et la Ville redouble d’efforts pour confirmer le succès. « Nous avons organisé la 42e édition de la corrida de Noël le 15 décembre dernier, où plusieurs milliers de coureurs étaient présents », explique Vincent Richert. « La nouveauté était la mise en place d’une randonnée pour les personnes qui ne se voyaient pas courir et qui ont pu faire une marche de 3 km. »
 

 

Le sport santé attire une population majoritairement féminine

 
Après 9 mois d’existence, le dispositif sport santé d’Issy-les-Moulineaux présente un premier bilan positif. « Nous avons noté que nous attirions surtout une population féminine qui aurait autour de la cinquantaine », dévoile le directeur administratif et financier de l’Office municipal des sports. « C’est frappant. Pour elles, c’est une bonne chose car il y a un aspect de réinsertion sociale. Les plus introverties se voient resociabilisées. Le but, c’est que les personnes s’inscrivent dans un club, mais cela prend évidemment du temps. Il faut de la continuité dans l’accompagnement. » Un constat que partage Kamel Saïdani. « Sur le terrain, il y a effectivement une grande majorité de femmes », remarque l’éducateur sportif. « Sur mes groupes de 26 personnes, je n’ai que 5 hommes et sur la durée, les femmes auront plus tendance à rester que les hommes. J’ignore si cela est dû au fait que les femmes font plus attention à leur santé, mais il y a une carence concernant la population masculine. Il y a un vrai travail à faire de ce côté-là. » Avec un coût estimé entre 25 000 et 30 000 euros entièrement financés par la Ville, en prenant en compte le matériel et le processus de 10 séances par personne, le dispositif s’inscrit dans la durée. Et Issy-les-Moulineaux se veut être un fer de lance du sport santé dans la région. « De manière générale, le sport prend de plus en plus de place dans le quotidien des Françaises et des Français », note Vincent Richert. « Quand elles emménagent dans notre ville, les personnes nous demandent où elles peuvent se stationner et où elles peuvent faire du sport. C’est notamment le cas pour les entreprises qui font les demandes pour leurs salariés. Le sport est un excellent défouloir sur la pause du midi. C’est pourquoi nous avons mis en place, chez nous, trois séances de sport par semaine sur le temps du midi. Nous remarquons que cela diminue les arrêts maladies et augmente la productivité. Le sport aide même au travail ! » Le programme a même été poussé dans les crèches et les centres techniques de la ville où des réveils musculaires ont été mis en place. « Ce sont des personnes qui sont régulièrement debout et qui doivent avoir des postures particulières », explique Vincent Richert. « Nous organisons cela par cycle sur deux à trois mois. Et il y a du monde. C’est histoire de 5 à 10 minutes de mouvements de base mais cela fait du bien. Ce qui est bien, c’est qu’il y a toujours quelqu’un pour prendre le relais du coach sportif pour les faire. Nous sommes dans une spirale positive. » S’il n’en est qu’à ses premiers résultats, le dispositif du sport santé isséen a de quoi satisfaire même si beaucoup reste à faire. « J’en tire un premier bilan positif dans la mesure où le concept de sport santé va prendre de plus en plus d’ampleur dans le pays », estime Kamel Saïdani. « Dans les prochaines années, il y aura malheureusement de plus en plus de cas de cancers ou de maladies chroniques. La France est même un peu en retard dans le domaine du sport santé. Au Canada, par exemple, ils ont compris la nécessité du sport santé il y a plus longtemps. Mais c’est un début. À Issy-les-Moulineaux, il y a un fort potentiel. Peut-être devrions nous élargir le dispositif. Mais de manière générale, c’est positif. » Si son dispositif reste récent, Issy-les-Moulineaux compte bien accentuer ses efforts dans les mois, voire les années qui viennent. Et à l’image de Sylvie, de nombreux habitants gagnent à faire de la pratique sportive la première de leurs bonnes résolutions pour 2020. « Le sport santé, c’est tout bénéfice pour tout le monde ! J’encourage chacun et chacune à se mettre au sport. C’est le meilleur des médicaments. »
Plus d’informations sur www.issy.com
 

 

Le sport à Issy-les-Moulineaux en chiffres :

Si la ville d’Issy-les-Moulineaux s’est inscrite dans le dispositif du sport santé, ce n’est pas pour rien. En effet, la commune des Hauts-de-Seine ne compte pas moins de 12 000 licenciés dans ses clubs. Les habitants ont le choix parmi la bagatelle de 108 pratiques sportives qui peuvent s’effectuer en club. Pour celles et ceux qui se sont éloignés du sport, la Ville a donc investi entre 25 000 et 30 000 euros dans son dispositif, soit environ 500 euros par personne. Une cinquantaine de personnes, en majorité des femmes autour de la cinquantaine, se sont lancées. Un succès qui mérite d’être bonifié en attirant davantage d’hommes et en élargissant le dispositif.

Par Anthony Poix