Philippe Poncet : « Une épreuve d’une violence extrême »

Demain, jeudi 15 novembre, Philippe Poncet va tenter de courir le 200 mètres lancé, à vélo, sous assistance respiratoire en moins de 15 secondes au Vélodrome national de Saint-Quentin-en-Yvelines. Au-delà de la performance, son objectif est de faire parler de la maladie des poumons BPCO (broncho-pneumopathie-chronique-obstructive) dont il est atteint. Rencontre.

 

En quoi consiste exactement « le record de l’impossible » que vous allez essayer de faire tomber ?

Je vais tenter de battre mon record de 15s184 sur 200 mètres à vélo. C’est une épreuve de sprint qui ne fera pas dans les conditions habituelles puisque je serai lancé. Le défi est hors-normes car je serai sous oxygène, comme les trois quarts du temps dans mon quotidien depuis 8 ans. La vitesse est un paradoxe quand on sait qu’une personne sous assistance respiratoire pédale à environ 3 km/h. Ce sera une épreuve d’une violence extrême.

D’autres animations auront-elles lieu au Vélodrome national de Saint-Quentin-en-Yvelines en parallèle de votre tentative ?

Des collégiens aideront à l’organisation de cette journée, qui débute à 11 h 30. Mon association O2&Cie Urgence BPCO, en partenariat avec la Fédération française de cyclisme, la ville de Montigny-le-Bretonneux et le Vélodrome national, a invité des patients atteints de cette maladie qui seront initiés au challenge de la piste. L’équipe de France de cyclisme sur piste sera présente pour m’accompagner dans ma tentative vers 13 h, tandis qu’une vingtaine d’autres sportifs de haut-niveau assisteront à cette journée.

Votre record sur sprint date de 2015, qu’est-ce qui vous avez poussé, déjà à l’époque, à vous lancer dans ce défi ?

Cela fait partie du programme lancé par l’association O2&Cie Urgence BPCO depuis 2013 pour alerter l’opinion. Au court de la première année de sa création, j’ai fait la première accession des pentes du col de l’Espigoulier (Bouches-du-Rhône) sous assistance respiratoire. Je ne me lance pas ces défis à titre personnel, mais pour faire parler d’une pathologie totalement inconnue du grand public. Personne ne fait rien alors que cela fait 30 ans qu’on l’a découverte, qu’elle touche 4 millions de Français, à tous les âges. Alors, avec l’association, on place la barre haut pour faire parler de nous. Moi, je suis atteint depuis que je suis jeune, mais j’ai été diagnostiqué qu’à l’âge de 48 ans. Je pratiquais au haut-niveau et les problèmes sont apparus quand je me suis mis aux sports en altitude. Il y a une prédisposition génétique au BPCO, mais la maladie peut être aggravée par la pollution, la sédentarité ou les addictions. Le problème c’est que dans 85% des cas, elle est détectée quand les patients arrivent aux urgences. Si les gens sont diagnostiqués plus tôt, ils peuvent faire plus attention à leur mode de vie.

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Comment vous êtes-vous entraîné pour ce battre ce record ?

J’ai gardé mon côté sportif de haut-niveau et j’ai avalé les heures de préparation, sachant que depuis juillet, je m’entraîne deux heures par jour. C’est dur et très violent. Je roule sous oxygène avec un débit de 15 litres par minute. Pour donner un ordre d’idée, c’est l’équivalent de ce que les pompiers utilisent dans les cas extrêmes.

Êtes-vous confiant avant de vous lancer dans cette tentative ?

Passer sous les 15 secondes, on sait que c’est impossible, mais on va tout faire pour y arriver quand même. Cela reste une épreuve extrême et, dans ces conditions, ça peut dérailler au niveau du souffle. Il y a des sportifs qui se mettent dans le rouge, moi je me mets dans le noir et je ne suis pas sûr d’en sortir.

Comment avez-vous convaincu la FFC de vous accompagner dans cette tentative et dans votre communication ?

Je suis originaire du sud de la France et je passe les trois quarts de mon temps sur le vélodrome d’Hyères (Var). Je côtoie Clara Henriette, ancienne pistarde de haut niveau, et Hervé Thuet, détenteur de 13 coupes du monde de sprint, qui est devenu manager à l’association. J’ai un grand respect pour cette discipline exigeante, mais qui ne bénéficie pas d’assez de communication. Quand je les vois courir sur la piste, je suis plus impressionné par eux que par moi-même.

Propos recueillis par Leslie Mucret