Michael Tapiro : « Urgent de réformer le Top 14 »

Charl McLeod of Stade Francais during the Top 14 match between Bordeaux Begles and Stade Francais on September 9, 2017 in Bordeaux, France. (Photo by Manuel Blondeau/Icon Sport)

Michael Tapiro, président de Sports Management School, expert en sport business et surtout passionné de rugby, s’est penché récemment sur les racines des maux qui touchent le XV de France et le rugby tricolore. Ce mardi, retrouvez la deuxième partie de cet entretien…

 

Michael Tapiro, après nous avoir donné quelques éléments d’explication sur la situation actuelle du rugby, pensez-vous qu’il existe des solutions pour mettre fin à cette période difficile ?

Oui, il y en a. Déjà, le président Laporte a annoncé en septembre dernier que les jeunes allaient rester dans leur club et non à Marcoussis. C’est une décision très importante, d’autant qu’elle arrive après de longues années où aucune décision de poids n’avait été prise. Nous avons été catastrophiques en 2015, mais rien n’avait été fait pour trouver des solutions. En Angleterre, la Coupe du Monde 2015 a été désastreuse, mais le rugby anglais a réagi, il a pris les décisions et la stratégie qui s’imposaient. Cette absence de gouvernance a été dramatique. Au moins, avec Bernard Laporte, des évolutions sont mises en place, même s’il faut les poursuivre et continuer ce travail.

Ces derniers mois, la problématique des commotions cérébrales est notamment devenue un enjeu majeur…

Oui, c’est un problème global que l’on retrouve dans le Top 14 car nous avons un championnat de collision et non d’évitement. Parfois, on peut avoir le sentiment que nous avons oublié la culture du jeu au pied. Maintenant que toutes les équipes sont parfaitement organisées, il faut absolument retrouver cette arme. Et puis comme nous sommes restés dans un jeu de collision plutôt que d’évitement, nos adversaires ont tendance à s’adapter et à justement s’appuyer sur la rapidité d’exécution. On l’a vu avec le Japon, qui a un tout petit réservoir mais qui grâce au travail d’Eddie Jones, a pu progresser et nous mettre en difficulté il y a quelques semaines grâce à son jeu très rapide. Nous sommes en retard par rapport à d’autres nations qui ont compris que le rugby d’aujourd’hui était basé sur cette rapidité dans le jeu et les transmissions.

Plusieurs personnalités du rugby réclament une évolution de notre championnat, qu’en pensez-vous ?

Il est urgent de réformer le Top 14, d’ailleurs, les Anglais veulent également réduire leur championnat à dix équipes. Aujourd’hui, les rugbymans français jouent beaucoup trop, nous avons trop de matchs. On se rend compte actuellement qu’il y a une limite physiologique au combat, les joueurs sont psychologiquement et mentalement usés. Malheureusement, on a toujours des conflits entre la Ligue, la Fédération, les clubs, la sélection. C’est dommage car toutes les composantes du rugby français ne tirent pas toutes dans le même sens. Bernard Laporte connait à la fois le fédéral et les clubs, je pense que l’on peut lui faire confiance pour trouver des solutions. Cette guerre entre la LNR et la FFR n’est bonne pour personne, il faut absolument retrouver une ligne directrice et se servir de cette Coupe du Monde en 2023 qui peut être un véritable espoir. Nous sommes en phase de reconstruction, il faudra au moins faire bonne figure l’année prochaine au Japon avant de se concentrer sur notre Mondial. Nous avons des signaux négatifs depuis des années, on a parfois voulu se rassurer avec la finale de 2011 ou quelques autres performances intéressantes, mais on ne peut plus se cacher. Là, on va avoir un cycle de six ans au lieu de quatre ans, il va falloir changer certaines choses, donner leur chance aux jeunes, les mettre dans les meilleures conditions. On doit également veiller à ce que leur mentalité soit irréprochable, qu’ils aient le sens de l’amour du maillot et du devoir de se battre pour lui. Nos jeunes sont ceux de 2017, ils sont parfois trop centrés sur eux alors que le rugby est un sport collectif. Nous devons rester vigilants et attachés à ces valeurs.

> Pour relire la première partie de cet entretien : urlz.fr/6jLg