Mathieu Faivre, le roi de la glisse de Nice

Double champion du monde l’hiver dernier, Mathieu Faivre a pris rendez-vous pour cette nouvelle saison de Coupe du monde et pour les Jeux olympiques de Pékin (4-20 février). Le Niçois compte bien mettre un peu plus en lumière sa discipline.

De l’or au bout des skis. Sur la neige italienne de Cortina d’Ampezzo, l’hiver dernier, l’équipe de France est repartie des championnats du monde avec deux titres. Deux médailles d’or, autour du cou d’un seul homme, Mathieu Faivre. Le skieur d’Isola 2000 a brillé de mille feux lors du slalom géant et du parallèle, et montré qu’il était un homme de grands rendez-vous. L’hiver a débuté avec des résultats un peu plus modestes pour Mathieu Faivre (11e du Géant d’ouverture à Sölden, en Autriche, et 8e à Val d’Isère), mais intéressants en Super-G (22e et 15e des deux Super-G de Beaver Creek aux Etats-Unis). Les Jeux olympiques de Pékin approchant, nul doute que le géantiste azuréen jouera sa carte à fond sur une neige que les skieurs ne connaissent pas.

Mathieu, la pression des Jeux olympiques, qui arrivent dans un mois, est-elle différente de celle que vous devez gérer sur les autres événements ?

Les Jeux olympiques, c’est une pression un peu différente. Quand on dispute la Coupe du monde, on fait des calculs sur une saison complète. Si on marque peu de points sur une course, on peut se rattraper par la suite. Sur une course d’un jour, on n’a pas le choix, on sait que ça doit fonctionner ce jour-là, qu’il n’y aura pas moyen de faire machine arrière ni se rattraper plus tard pendant l’hiver.

Les Jeux se déroulent en Chine, à Pékin, sur une neige artificielle que les skieurs ne connaissent pas. Avez-vous une idée de ce qui vous attend ?

Cela devrait être des neiges qu’on peut assimiler aux neiges nord-américaines, très sèches, très agressives. Mais on pensait que ça allait être comme ça à Pyeongchang (aux Jeux olympiques 2018), et une fois sur place, on s’est rendu compte que c’était bien pire, avec une neige encore plus agressive, beaucoup plus abrasive. Les conditions étaient difficiles à dompter, à gérer. Pour Pékin, personne n’a pu s’entraîner sur cette neige, personne ne connaît réellement les conditions là-bas, et donc personne n’a pu mettre une stratégie en place pour cette piste olympique. Ce sera la même chose pour tout le monde. On est un sport d’adaptation, on a l’habitude de faire avec des écarts de température et des conditions différentes. Il faudra faire au mieux quand on sera sur place pour s’adapter, et il y aura quoi qu’il arrive des médailles à la fin de la course.

« A nous de donner de la visibilité à notre sport »

Doit-on vous attendre uniquement sur le Géant aux Jeux olympiques ?

Pour les Jeux olympiques, ça dépendra des qualifications. Dans la perspective où tout se passe bien, je ferai le Géant. Il n’y a pas de Parallèle, mais un Team Event, il faudra voir quelles seront les conditions mises en place par la fédération pour se qualifier pour cette compétition. Dans la perspective d’une troisième discipline, il y a le Super-G. Grâce à ma fin de saison dernière, j’ai les 500 points, donc je peux m’élancer derrière le Top 30 mondial en Super-G. Je me suis entraîné avec le groupe vitesse aux Etats-Unis cet hiver.

Avez-vous l’impression que les Jeux de Pékin ont été un peu éclipsés par ceux de Paris 2024, de la part des instances françaises ?

Je l’ai un peu ressenti. Ils mettent tellement d’énergie dans les Jeux olympiques de Paris 2024, tellement de cœur pour que ce soit une fête réussie pour la France et pour que cela insuffle une nouvelle dynamique sportive dans le pays, qu’évidemment, ils veulent les mettre en avant. Je comprends que cela soit très important pour les instances sportives françaises. Et nous, on a quand même les moyens de nous entraîner, de faire les choses correctement. On aimerait aussi faire parler un peu plus de nos sports. Il y a deux façons de faire : aller voir les médias pour leur dire qu’ils ne parlent pas assez de nous, ou faire en sorte de faire parler plus de nous en ayant des résultats et en donnant un peu plus d’intérêt à nos sports, et plus de visibilité. Je préfère la deuxième solution.

Vos deux titres mondiaux vous ont-ils donné plus d’opportunités au niveau du sponsoring ?

Pas tant que ça ! J’ai entrepris des démarches, mais nous sommes aussi dans un système fédéral où il y a des règles. Il faut les respecter et faire les choses correctement. On n’a pas une liberté de mouvements très importante pour trouver de nouveaux partenaires et pour leur donner de la visibilité. Cela découle de la fédération internationale, qui cloisonne énormément la visibilité des partenaires sur nos tenues, sur nos casques. C’est un tout qui fait qu’aujourd’hui, c’est compliqué de trouver de nouveaux partenaires. C’est compliqué d’aller voir quelqu’un et de lui dire : « j’ai envie de travailler avec vous, mais je n’ai pas de visibilité à vous donner. » Il faut trouver une solution, pour qu’on puisse tous y trouver notre compte.

« S’inspirer de ce qui ce fait en Formule 1 et en MotoGP »

Vous voulez dire que pour avoir un nouveau partenaire, il faut l’aval de la fédération ?

Pour vous donner un exemple, c’est la FIS (fédération internationale de ski) qui détermine le nombre de sponsors qu’on peut mettre sur nos casques. On a un seul emplacement, qui est donné aux fédérations nationales. Et nous, la fédération française de ski nous permet de le commercialiser. C’est un processus à trois étapes. Si aujourd’hui, on nous autorisait à avoir deux ou trois sponsors sur notre casque, cela élargirait l’horizon de possibilités.

Cela étant, ce n’est pas mon métier. Mon métier, c’est de m’entraîner, de faire du ski. Mais je pense quand même que lorsqu’on voit ce qui se fait en Formule 1 et en MotoGP, tous ces sports qui se rapprochent un peu du nôtre, à savoir un sport de matériel, d’équipement, avec des casques et des combinaisons, il y a vraiment moyen d’insuffler une autre énergie à notre sport. Notre système est en place depuis des années, parce que la FIS n’a jamais réellement voulu emboiter le pas à ces sports qui, finalement, ont eu un essor incroyable. De notre côté, on est resté un peu plus confidentiel parce qu’on n’a pas réussi à prendre ce virage.

Démarcher de nouveaux sponsors, c’est quelque chose de naturel chez vous ?

J’ai la chance d’avoir un partenaire qui me suit depuis que je suis tout jeune, avec les gens d’Isola 2000, de Nice et de la métropole Nice Côte d’Azur. Ils me sponsorisent depuis que j’ai 15 ans, et je me retrouve en eux. Du coup, je n’ai jamais eu à faire de réelles démarches pour trouver un nouveau sponsor pour mon casque. J’ai fait des démarches pour trouver des sponsors annexes, qui sortaient un peu du cadre purement montagne. Cette année, j’ai contacté des agents pour voir ce qui était possible, dans le but de capitaliser sur mes deux médailles d’or mondiales. Et en fait, on s’est vite rendu compte qu’il n’y avait pas beaucoup de possibilités. Il faut trouver un juste équilibre pour que la fédération puisse toujours trouver des financements, mais aussi pour que les athlètes puissent avoir une plus grande liberté de mouvement, afin de pouvoir vendre leur palmarès, leur travail. Ce sont des discussions qu’il faut avoir, des compromis à trouver.