Lucas Chanavat à fond

Vainqueur à trois reprises la saison passée sur le circuit de la Coupe du monde, le fondeur Lucas Chanavat aborde l’exercice 2020/2021 avec ambition. Le natif du Grand Bornand, enfin laissé tranquille par les blessures, est en mesure de montrer tout son talent.

« C’était une saison spéciale… très spéciale… je m’en souviendrai, c’est sûr ! » Lucas Chanavat n’est en effet pas prêt d’oublier l’exercice 2019/2020. Lui le fondeur du Grand Bornand a obtenu ses deux premiers succès sur le circuit Coupe du monde. « Le premier c’était en décembre, en Russie », se remémore Lucas Chanavat. « Quand j’ai passé la ligne, c’était vraiment beaucoup d’émotion. Cela faisait un moment que je tournais autour de la victoire. Je suis passé plusieurs fois à côté il y a deux ans, même chose en début de saison dernière… Remporter cette première victoire était mon grand objectif de l’année. C’était un grand moment, ça m’a tout de suite donné envie d’en gagner une autre. Heureusement, je n’ai pas eu à attendre longtemps avant de m’imposer à nouveau (rires). » Début janvier, il lève à nouveau les bras, cette fois en Allemagne, remportant un nouveau sprint. « En plus, le lendemain, on gagne en duo avec Renaud Jay, ce qui a permis de renforcer cette dynamique positive. » Une dynamique stoppée net par la pandémie de Covid-19, qui a poussé la FIS (Fédération internationale de ski) à stopper la Coupe du monde avant la fin des épreuves. « Au moment où c’est arrivé, j’étais au Canada, prêt à disputer ma prochaine course. La course a finalement été annulée du jour au lendemain. Étant souvent à l’étranger en raison du calendrier mondial, j’étais assez éloigné et peu au courant de l’ampleur qu’avait prise la pandémie en France. Les décisions nous ont dépassés un peu, c’était brutal, mais c’était quelque chose de beaucoup plus grand que notre sport. Il était donc logique de stopper la saison. »

« Arriver dans les meilleures conditions dès le début de l’hiver »

Saison stoppée, certes, mais le moral de Lucas Chanavat n’a pas été entamé pour autant. « Le printemps est une période où je pars habituellement en vacances, dont le premier confinement n’a pas vraiment eu d’incidence sur ma préparation. J’en ai profité pour me reposer, me poser un peu aussi, car nous sommes souvent en déplacement. J’ai aussi pu faire le bilan de ma saison, qui je pense a été ma meilleure en Coupe du monde et qui valide mes progrès. » Le reconfinement mis en place en France, à l’approche de l’entame de la nouvelle saison, n’est d’ailleurs pas de nature à inquiéter le natif du Grand Bornand. « Je dois avouer que je ne me focalise pas trop sur le fait que ça puisse courir ou pas. Je me suis préparé pour une saison complète, donc si toutes les courses ont lieu c’est tant mieux. Sinon, tant pis, j’imagine que la Fédération internationale de ski sait ce qu’elle fait et prendra les meilleures décisions. » La FIS a programmé le début de saison au 27 novembre, du côté de Ruka (Finlande), et la fin le 21 mars 2021 avec l’organisation des finales de Coupe du monde à Pékin (Chine). Entre ces deux dates, difficile de savoir quelle sera la position de la FIS concernant le maintien des courses, tant l’évolution de la situation sanitaire demeure floue. Une période d’incertitude qui n’a pas empêché le fondeur de 25 ans de se préparer comme jamais. « J’ai repris l’entraînement à partir du mois de mai et je n’ai pas arrêté jusqu’au début de cette saison. La saison passée a été plus courte que prévu, et on ne sait pas vraiment combien de temps va durer la nouvelle. Il était donc important de miser sur une préparation qui me permette d’arriver dans les meilleures conditions dès le début de l’hiver. »
 

« L’enchaînement Mondiaux-JO-Mondiaux donne envie »

Une saison que Lucas Chanavat aborde avec confiance, lui qui a été laissé tranquille par son corps depuis désormais plus d’un an. « Je m’étais fait opérer des hanches au moment de la préparation de la saison dernière. Mon tout début de saison avait donc encore une fois été perturbé. Mais en 2020, il est vrai que c’est la première année où je n’ai pas été opéré et où je n’ai pas été blessé. Avoir été opéré des hanches m’a permis d’atteindre des amplitudes que je ne pouvais pas atteindre auparavant, ça m’a été très utile durant la saison. » Un vrai soulagement pour le fondeur, victime d’une hernie discale en 2014. « C’était une période très compliquée. Il a fallu que je me reconstruise peu à peu. C’était une année à zéro heure d’entraînement, alors qu’habituellement je cumule 800 heures d’entraînements dans l’année. C’est cette endurance qu’il était nécessaire de retrouver. Ça a mis un peu de temps, mais j’ai pu m’entraîner et progresser. » Champion du monde espoir en 2016, Lucas Chanavat a ensuite eu l’occasion de montrer toutes ses qualités sur le circuit Coupe du monde, jusqu’à finalement lever les bras il y a un an. « Les années de travail paient, ainsi que l’expérience des dernières années. Je pense que c’est cette combinaison de facteurs qui m’a permis d’imposer en Coupe du monde. J’ai montré beaucoup de détermination, malgré les moments difficiles, les blessures, je n’ai jamais rien lâché. Alors oui, forcément, ces succès ont résonné pour moi comme une récompense des efforts et des sacrifices de ces dernières années. »

« Les JO de Pékin sont dans un coin de ma tête »

Le spécialiste du sprint, plus fort qu’il ne l’a jamais été, peut-il se montrer ambitieux ? « La saison dernière, j’ai plusieurs fois réussi à être en tête du classement général du sprint, donc il est clair que ça me donne des idées pour cette année. Je vais tout de même essayer de fonctionner de la même façon, à savoir prendre les courses les unes après les autres et être le plus performant possible sur chaque course », confie le principal intéressé. Lucas Chanavat se méfie de la concurrence, d’autant qu’elle est clairement identifiée. « Johannes Høsflot Klæbo et Federico Pellegrino sont les skieurs qui seront les plus forts sur les sprints. Ce sont à la fois des adversaires, mais aussi des références qui me poussent à progresser pour aller les chercher de manière plus régulière. » Objectif briller en individuel… mais aussi en relais. « Nous avons de grandes ambitions sur les relais en Coupe du monde, c’est vrai », confirme Lucas Chanavat. « Il y a des possibilités de victoires et même de médaille sur les Mondiaux. Clairement, monter sur le podium le plus régulièrement possible est un objectif. Je pense que nous n’avons jamais eu une équipe de France aussi dense. Elle s’est construite d’année en année et il est évident que le niveau augmente. Cette émulation est bénéfique pour le groupe et pour chaque individualité au sein de ce groupe. » Avec Renaud Jay, Richard Jouve et bien évidemment Lucas Chanavat, l’équipe de France a de beaux jours devant elle… y compris du côté de Pékin en 2022. « Les Jeux olympiques de Pékin sont clairement dans un coin de ma tête. C’est un rendez-vous qui a d’ailleurs déjà des influences sur la préparation qui est la mienne aujourd’hui. Il y a des risques que je me permets de prendre cette année que je ne prendrai pas l’année prochaine, c’est certain. Même si je prends les étapes les unes après les autres, les JO sont le rendez-vous qui est le fil conducteur de mes quatre années de travail. »

Par Olivier Navarranne