Les futurs champions font leur rentrée à l’INSEP

© INSEP

41 jeunes sportifs ont rejoint l’internat des mineurs, cette année à l’INSEP. SPORTMAG était présent pour l’emménagement des nouveaux arrivants, et vous raconte cette rentrée des classes particulière.

Les sportifs ne font rien comme les autres. A l’INSEP (Institut National du Sport, de l’Expertise et de la Performance), la rentrée des classes pour les petits nouveaux – âgés de 13 à 17 ans – est prévue… un dimanche ! Il est 9h, le 28 août, quand les premières familles arrivent sous un grand soleil qui illumine le bâtiment en brique rouge dans lequel les champions de demain vont s’installer.

Anne Templet, responsable de l’internat des mineurs, briefe une dernière fois ses équipes dans une bonne humeur communicative. « La rentrée, c’est toujours un peu particulier, parce qu’on a d’une part les jeunes qui arrivent, mais aussi l’équipe d’encadrement – les surveillants – qui est renouvelée. C’est vraiment une période qui va déterminer la suite de l’année. C’est donc important de bien prendre ce temps d’explication, d’information, de contact avec à la fois les équipes, les surveillants – on l’a fait la semaine précédente en les réunissant en séminaire pendant deux jours – et avec les jeunes qu’on accueille aujourd’hui, avec un temps dédié aux parents et un temps dédié aux jeunes », explique celle qui est aux commandes depuis plus de 20 ans.

« C’est Disneyland pour les sportifs ! »

Cette année, ils sont 41 mineurs (25 filles, 16 garçons) à intégrer le fameux bâtiment I de l’INSEP. Ils pratiquent le basket, la natation, la gymnastique, le judo, la lutte ou le tir à l’arc, et ils se lancent tous dans un projet prestigieux où ils vont combiner études et sport de haut niveau. Ambre Chevreau, championne d’Europe U17 de lutte cette année, prend ses marques, accompagnée de sa maman. « Je suis super heureuse d’être ici. J’en parle depuis un petit moment, et vivre ça aujourd’hui, ça fait bizarre. Mais je suis super heureuse d’être là, j’ai hâte que l’année sportive commence, se réjouit-elle. La première fois que suis venue ici, j’ai appelé ma mère pour lui dire : « c’est incroyable, c’est Disneyland pour les sportifs ! » On se dit qu’il y a des attentes, mais c’est aussi pour ça que je suis là. C’est pour avancer, et j’espère moi aussi devenir un jour une « grande sportive ». C’est un peu de pression mais je suis vraiment heureuse d’être là. Cela montre que j’avance et que je progresse dans mon parcours sportif. »

« Je suis impatiente de commencer, explique de son côté Justine Loubens. C’est une grande fierté pour moi d’être ici. C’était mon objectif de venir à l’INSEP depuis mon entrée au Pôle Espoirs de Toulouse. » La jeune basketteuse a de qui tenir, puisqu’elle est la fille de Lœtitia Moussard Loubens. La pivot aux presque 200 sélections a été championne d’Europe avec l’équipe de France en 2001. Elle a remporté l’Euroligue la même année avec Bourges, et une pléiade de titres nationaux – dont le championnat avec Mirande (1988, 1989 et 1990) et Bourges (1999 et 2000). « Je suis très contente pour elle. Quand elle est rentrée au Pôle Espoirs en Occitanie, elle s’est vraiment approprié le projet. Jusque-là, je pensais que le basket était un amusement. La voir autant investie dans cette préparation individuelle, et avoir réussi à suivre mes traces, mais à un autre poste de jeu et avec d’autres qualités que les miennes, je trouve ça super. Il n’y a aucun point de comparaison dans le jeu, elle est à fond dans son projet, elle a ses objectifs, et elle est déterminée », raconte, admirative, la mère de Justine, qui n’était pas passée par l’INSEP – « je m’étais dégonflée » – mais par Mirande, « un très bon club formateur ».

« On fait passer des messages éducatifs »

Au cœur du bois de Vincennes, les jeunes arrivants vont être mis dans les meilleures conditions pour combiner sport et études, avec une obligation tout de même : un retour en chambre qui doit être à 22 heures maximum. Un programme qui n’est pas de tout repos. « Une vingtaine d’heures de cours, en plus des entraînements, des temps de devoirs surveillés, les mêmes examens que les lycéens classiques. C’est beaucoup pour des ados, mais quand le projet est vraiment personnel, ça leur donne une énergie incroyable et ça leur permet de tenir, d’enchaîner aussi les week-ends de matchs, les semaines de stage. C’est vraiment un rythme très spécifique », explique Anne Templet. A l’internat des mineurs, tout est fait pour simplifier au maximum la vie des adolescents : « L’idée, c’est de pouvoir leur donner des conditions d’accueil matérielles satisfaisantes, et un accompagnement au quotidien dans le suivi de tout ce qui peut se passer dans la vie du sportif. On fait le lien entre la partie scolaire, la partie sportive, le bien être du sportif et son éducation, puisqu’on fait passer des messages éducatifs auprès de nos jeunes. »

C’est pour cette raison que la rentrée débute par trois jours d’intégration, avec des ateliers comme « nutrition et performance », « dimension mentale au quotidien », « sommeil et récupération au service de votre performance » ou encore « prévention dopage ». « Même s’ils arrivent souvent de structures pour les sportifs de haut niveau, il y a encore beaucoup de choses à acquérir en tant que nouveau, en tant que jeune sportif, détaille Anne Templet. Toutes ces bases-là, s’ils réussissent à les avoir maintenant, c’est ça de gagné pour la suite. Ce fameux temps de l’entraînement invisible est très important. C’est la nutrition et le sommeil, l’hygiène de vie, la régularité, la rigueur au quotidien. C’est se pousser aussi quand on n’a pas envie d’aller à l’entraînement ou en cours. Ce n’est pas facile tous les jours, ce rythme très intensif. Ces trois jours d’intégration, c’est vraiment pour leur dire : « vous avez choisi d’être là, maintenant, il faut vraiment mettre tout en oeuvre pour tracer votre chemin, réussir votre projet, et nous, on vous apporte tous les éléments pour réussir ». »

« Je réalise ce que ma mère a vécu »

Les jeunes vont d’abord devoir réussir à gérer l’éloignement avec la famille. « Quand j’étais au pôle, c’était à 30 minutes à peine de la maison. Maintenant, c’est à 7 heures de route. Je pense que le début va être un peu compliqué, même si en avion ou en train, je serai vite rentrée. Je pense que je vais m’y faire », prédit Justine. « Être loin de la famille, j’ai l’habitude. Mais être ici, ce n’est pas pareil qu’à Dijon. Le niveau va être plus élevé, on va s’entraîner avec des filles qui ont déjà des titres mondiaux chez les seniors, d’autres ont participé aux J.O. C’est super cool, je pense que ça va bien m’aider à progresser, mais c’est vrai que ça va être un cran au-dessus. J’ai hâte de découvrir, explique Ambre, déjà très à l’aise dans sa chambre. J’ai découvert que j’étais toute seule, je suis super contente. C’est vrai que pour travailler ou le soir, après une journée avec tout le monde, ça fait du bien d’être un peu seule de temps en temps. »

Devant les enfants, les parents font également bonne figure. « C’est sûr que ça va faire un vide parce que la petite prend quand même de la place. Mais je vois qu’elle est épanouie et heureuse, c’est ça le principal. Et en cette rentrée, je réalise ce que ma mère a vécu en d’autres temps, et c’est vrai que ça va faire un manque. Mais elle est heureuse, elle est à la place où elle doit être, donc ce n’est que du bonheur pour elle et je préfère me focaliser là-dessus. L’INSEP, c’est le top du top. C’est à elle d’écrire son histoire. Je suis simplement là pour la conseiller, mais je ne la drive pas, il n’y a pas de télécommande… C’est elle qui est actrice de son propre projet », raconte Lœtitia Moussard Loubens. « Vive les nouveaux moyens de communication ! La visio, le téléphone. On les utilise énormément. C’est juste un éloignement kilométrique, mais je suis très vigilante et elle sait aussi que je la suis, et que je la soutiendrai quand elle en aura besoin. La lutte, elle la pratique depuis ses quatre ans, et elle n’a pas arrêté. C’est vraiment une passion pour elle. Elle n’en fera peut-être pas son métier, mais si elle peut cumuler sa scolarité en ayant des bons résultats et des résultats sportifs en pratiquant sa passion, ce sera génial. », assure de son côté Sandrine Chevreau, la maman d’Ambre, très fière du parcours de sa fille.

« Dès demain, tu prends les escaliers »

Les familles se rassurent en évoquant la maturité exceptionnelle de leur progéniture. « Elles sont beaucoup plus matures que nous au même âge. Elles sont vraiment actrices de leur projet, on leur parle très tôt, de la violence, de la nutrition, de l’hygiène de vie, avec des professionnels. Nous, c’était une personne qui était chapeautait un petit peu tout. Ici, elle est gérée par des personnes au top dans leur domaine, et c’est vraiment bien. Tout est fait pour les mettre dans les meilleures conditions possibles », explique la mère de Justine. « Elle a appris à se débrouiller toute seule en étant loin, à s’organiser. J’ai une autre fille plus grande et effectivement, qui n’avait pas cette même autonomie au même âge. Je lui laisse une totale liberté tant qu’elle respecte les règles. La confiance, c’est le mot d’ordre, avoir confiance l’une dans l’autre », embraye la maman d’Ambre. La jeune lutteuse s’imagine grandir encore plus vite à l’INSEP : « Je n’ai pas les mêmes objectifs que d’autres personnes de mon âge. J’ai des amis qui ne sont pas du tout dans le sport, et qui font une scolarité normale, 8h-18h, et c’est tout. Je sais que je ne pourrais pas retourner faire un 8h-18h, c’est hors de question. J’ai l’impression qu’on grandit plus vite, et ici, il n’y a que des sportifs, on va tout le temps être entouré, ça ne peut être que bénéfique pour grandir encore plus. »

Avant de se dire au revoir, certains parents tentent de se rassurer. « Je vais te manquer », affirme une maman à son fils basketteur. D’autres prodiguent un dernier conseil. « Aujourd’hui, tu peux prendre l’ascenseur pour monter les affaires, mais dès demain, tu prends les escaliers », propose le père de Lilya Cohen – tout heureux d’être là – à la jeune lutteuse. Dernières complicités familiales avant que les choses sérieuses commencent.

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