Les Championnats du monde de gymnastique : une étape vers les JO

Samir Ait Said, FRA, after rings final at 2019 artistics world championships in Stuttgart; 12/10/2019; Foto: SCHREYER Photo by Icon Sport

Les gymnastes français hommes et femmes étaient à Stuttgart en octobre pour les Championnats du monde. Le bilan est mitigé avec une seule médaille, le bronze aux anneaux pour Samir Aït Saïd, mais il offre une base de travail dans la préparation aux Jeux olympiques de Tokyo.

 
Un podium, la qualification de l’équipe féminine et de trois hommes en individuel pour les Jeux olympiques de Tokyo en 2020. Voilà le bilan de l’équipe de France de gymnastique artistique après les Championnats du monde qui ont eu lieu du 4 au 13 octobre à la Hanns-Martin-Schleyer-Halle de Stuttgart en Allemagne. « Ces championnats étaient une étape supplémentaire vers les Jeux olympiques de Tokyo en 2020 », résume Kévinn Rabaud, le directeur technique national à la Fédération française de gymnastique. « Ils ont permis de nous évaluer, voir nos progrès et nos difficultés. Pour les garçons, ils marquent le début d’un changement et pour les filles, ils sont fondateurs d’une nouvelle étape pour les amener vers les podiums. Avec sa médaille de bronze, Samir Aït Saïd a ouvert la voie, il a montré que c’était possible de monter sur un podium mondial. Cela tempère la déception qu’on aurait pu avoir. »

La délivrance pour Samir Aït Saïd

La grande joie est venue la veille de la fin des Championnats du monde, lorsque Samir Aït Saïd a décroché la médaille de bronze aux anneaux et par la même occasion sa participation aux Jeux olympiques de Tokyo. Grâce à un mouvement propre et maîtrisé sur son agrès de prédilection, le sociétaire du Pôle d’Antibes est monté sur son premier podium mondial, lui qui détient six médailles européennes, dont un titre en 2013. C’est également la première médaille à ce niveau chez les hommes depuis 2014. « C’est quelque chose d’énorme ! », s’enthousiasme Samir Aït Saïd. « Je me suis bagarré pour y arriver. Cette médaille et cette qualification, on ne me les a pas données. » « Je suis très heureux pour lui », ajoute Kévinn Rabaud. « C’est une médaille qui fait du bien et pour laquelle il a travaillé d’arrache-pied. » Cette troisième place a d’autant plus de saveur qu’elle intervient trois ans après une grave blessure lors des Jeux olympiques de Rio. « Je pense que tout athlète a envie de revenir plus fort », déclare le gymnaste. « Avec ma détermination, j’ai tout fait pour m’exprimer à mon meilleur niveau. » La qualification en poche, Samir Aït Saïd va pouvoir se préparer en vue de l’événement olympique. « Le plus dur commence pour moi. Ça va être une mission commando avec beaucoup de cardio et beaucoup de temps en salle. » Mais d’abord : « Un peu de repos sera le bienvenu, car le corps a beaucoup pris et la tête aussi est fatiguée. Il ne faut pas oublier que le repos est un facteur de performance, c’est un peu comme l’essence dans la voiture. »

« Une claque » pour l’équipe de France masculine

Samir Aït Saïd, tout comme Cyril Tommasone, le doyen de la délégation française, a participé avec ses partenaires au concours général par équipes. « Ces spécialistes ont pris leurs responsabilités et ont démontré un bon état d’esprit », souligne Kévinn Rabaud. Cependant, cela n’a pas payé. Les Bleus ne sont pas parvenus à entrer en finale et ont laissé filer le billet pour les Jeux olympiques dans huit mois, une première depuis les JO de Barcelone en 1992. « C’est clairement une grosse claque, mais cela nous servira de leçon pour les prochaines olympiades », confie Samir Aït Saïd. « Après la déception, il a fallu ne pas s’apitoyer sur son sort et retourner à la bagarre. » « On ne peut pas s’en satisfaire », appuie le DTN. « Cette déception est le fruit de difficultés. Nous allons réorienter le travail pour être concurrentiels pour 2024. Nous avons de bons jeunes qu’on ne pouvait pas faire figurer dans ces championnats du monde et d’autres qui étaient blessés. » Les Bleus seront représentés aux JO par Samir Aït Saïd, mais aussi par Cyril Tommasone, 6e de la finale au cheval d’arçons, et Loris Frasca, 18e au concours général. « Nos spécialistes seront nos meilleures chances de médailles pour août prochain », avance le DTN.

Un bilan mitigé chez les filles

En revanche, l’équipe de France féminine a bien validé sa participation à l’échéance tokyoïte grâce à une 4e position lors des qualifications, puis une 5e place au terme de la finale. Quatre quotas non nominatifs sont déjà assurés. « Nous avons obtenu la qualification olympique par équipes, j’ai envie de dire que c’est le plus important », affirme Lorette Charpy. Cependant, la sociétaire du Pôle de Saint-Étienne éprouve une pointe de déception d’avoir manqué le podium avec ses coéquipières : « Nous avons laissé échapper la 3e place à cause d’erreurs en début de compétition sur les barres asymétriques. Cela a été difficile à rattraper dans la suite du concours. Cependant, nous avons prouvé qu’on peut faire des résultats mondiaux. Même en faisant des erreurs, nous nous rapprochons du podium. Il y a une vraie progression. Cette année, nous étions déçues de terminer 5e alors qu’en 2018, à Doha, nous étions heureuses d’atteindre cette place. » « Le bilan est contrasté, car les résultats chez les féminines sont en progression, mais ils n’ont pas été concrétisés par une médaille », ajoute Kévinn Rabaud. Championne d’Europe au concours général et au sol début 2019, Mélanie De Jesus Dos Santos est repartie bredouille de Stuttgart. La gymnaste du Pôle de Saint-Étienne a terminé 5e à la poutre et au sol, au terme de finales relevées et dominées par l’Américaine Simone Biles (voir encadré). La déception est surtout venue du concours général où deux chutes aux barres asymétriques l’ont reléguée à la 20e place. « Elle a réalisé un tour de qualification très bon qui l’a placé à la 3e position et qui faisait d’elle une candidate au podium », raconte Kévinn Rabaud. « C’est une désillusion, mais c’est aussi l’apprentissage. Elle doit franchir une nouvelle étape pour reproduire ses hautes performances européennes au plus haut niveau. Elle pourra compter sur nous et ses entraîneurs pour y parvenir. » Lors de ce même concours général féminin, la jeune Aline Friess, 16 ans et 4e lors des Jeux européens de Minsk (Biélorussie) en juin dernier, s’est classée à la 11e place. « Elle a fait preuve d’une grande maîtrise pour sa première compétition de niveau mondial », relève le DTN. N’ayant pas concouru sur tous les agrès en qualifications, Lorette Charpy n’a décroché aucun billet pour les finales. La Stéphanoise compte maintenant se replonger dans l’entraînement : « Je vais tout faire pour augmenter ma note de départ et réussir dans l’exécution pour avoir de bons résultats. »

Huit mois de préparation

La Fédération française de gymnastique a maintenant huit mois pour préparer ses athlètes aux JO. « Nous allons faire un bilan important de ces championnats du monde, voir les écarts avec les autres équipes, estimer où il faut ajouter des difficultés, répondre aux besoins, organiser des stages, des compétitions, des confrontations, participer à des matchs avec les nations phares. Pour les garçons, nous allons plus individualiser leurs parcours », détaille Kévinn Rabaud. Les Championnats d’Europe, qui se dérouleront fin avril 2020 à Paris pour les filles et à Bakou (Azerbaïdjan) fin mai pour les hommes, seront une étape importante. « Nous pouvons avoir des prétentions et envisager de nouvelles qualifications individuelles pour les JO », avance le DTN. « Nous pouvons placer une jeune fille non présente aux championnats du monde pour aller chercher un quota supplémentaire. À nous de présenter des athlètes avec du potentiel. » Après des Jeux olympiques de Rio sans médaille, la Fédération met tout en œuvre pour remettre la gymnastique française au premier plan.

Les résultats de l’équipe de France lors des finales :

Le phénomène Simone Biles :

« Je n’ai qu’un mot : impressionnante. » C’est ainsi que Lorette Charpy qualifie l’Américaine Simone Biles. Pendant ces Mondiaux, l’Américaine de 22 ans a battu le record de médailles mondiales pour un seul ou une seule gymnaste. En décrochant cinq titres à Stuttgart, au concours général individuel et par équipes, au saut, à la poutre et au sol, Simon Biles a porté son total à 25 breloques, 19 en or, 3 en argent et 3 en bronze. « C’est tout simplement incroyable ! », souffle Lorette Charpy. « On dirait qu’elle fait toutes ses figures avec beaucoup de simplicité. » « Elle produit une gymnastique à un niveau rarement atteint avec une facilité assez remarquable », poursuit Kévinn Rabaud. « Il ne faut pas oublier que derrière, il y a des heures et des heures d’entraînement. Simone Biles est une source d’inspiration pour nos filles qui se rendent chaque saison à son gymnase. »

La rédaction