Le Stade Rennais Rugby veut rester dans la mêlée

Le Stade Rennais Rugby s’est bâti pendant deux décennies pour devenir l’un des derniers clubs avec des équipes uniquement féminines. Dans une discipline en pleine mutation, la structure bretonne doit se réinventer pour rester au plus haut niveau et rappeler aux jeunes filles qu’elles peuvent faire le choix de ce sport.

 
Le rugby féminin a beaucoup évolué ces dernières années et le Stade Rennais Rugby ferait presque figure d’exception dans ce nouveau paysage. « Nous sommes un des derniers clubs exclusivement féminins du Championnat Élite 1 », souligne Vincent Brehonnet, l’entraîneur principal de l’équipe fanion. L’aventure a commencé en 1999. « Le club est né d’une volonté d’étudiantes qui étaient au Rennes EC rugby, de jouer entre elles », raconte Anne-Sophie Demoulin, présidente du Stade Rennais Rugby. Le club s’est alors structuré, a créé une école de rugby, un temps mixte puis uniquement féminine et a monté les échelons jusqu’à ce que sa meilleure équipe atteigne l’élite. Au fil du temps, de belles histoires se sont écrites comme celle de Miléna Buzenet, la demi de mêlée et actuelle capitaine. « C’est une histoire de famille », raconte-t-elle. « Ma mère était là à la création du club. J’étais tout le temps avec elle sur le terrain. Cela n’a pas été compliqué pour moi de suivre ce chemin. » Passée par l’école de rugby de Vitré, Miléna Buzenet est arrivée en cadette au Stade Rennais, tout en évoluant au pôle espoir à Rennes et a intégré l’équipe senior il y a six ans. Depuis le début de la saison, elle porte le brassard de capitaine. « C’est toute mon enfance, toute mon histoire, toutes ces années au sein du club qui se sont concrétisées », sourit-elle. « J’ai ses couleurs au fond de moi. »
 

 

Objectif phase finale

 
Le club comprend actuellement une équipe dans le Championnat Élite 1, une deuxième en Fédérale 1, des formations U18 et de rugby à 7. Les joueuses évoluent avec le statut amateur. Vice-championne de France en 2006 et 2011, l’équipe première bretonne n’a pas connu le meilleur début de saison 2019-2020 possible. « Nous sommes une jeune équipe en pleine reconstruction », indique Miléna Buzenet. « On sait qu’on a beaucoup de points à travailler et on espère se qualifier pour la phase finale. » Ces dernières années, le Stade Rennais a vu le rugby féminin évoluer autour de lui. « Nous sommes passées d’un top 8 à un top 16, avec deux poules de huit équipes en 2018 », rappelle la capitaine. « Un écart s’est créé entre le haut et le bas du classement. » « Le rugby féminin a évolué, il y a plus de densité, les staffs se professionnalisent. Le Championnat Élite 1 est en pleine mutation », ajoute Vincent Brehonnet, entraîneur au club depuis 4 ans. Dans ce contexte, se maintenir, puis finir dans les quatre premiers de la poule afin de se qualifier pour la phase finale est l’objectif de la saison du SRR. L’effectif senior compte quatre internationales de l’équipe de France à 7 sous contrat avec la Fédération française de rugby : Caroline Drouin, Valentine Lothoz, Jade Le Pesq et Yolaine Yengo. « Je suis très heureuse pour elles », affirme Anne-Sophie Demoulin, la présidente du SRR. « Nous soutenons l’équipe de France féminine à 7 dans son parcours pour la qualification pour les Jeux olympiques de Tokyo 2020 », ajoute le coach. Cependant, quand ces joueuses tentent de valider leur billet pour le Japon, elles ne jouent pas dans le Championnat de France. « C’est un handicap », concède Vincent Brehonnet. « Nous jouons avec des jeunes qui connaissent une formation accélérée, mais qui ont aussi besoin de l’expérience de ces très bonnes rugbywomen. » « On savait depuis le début qu’elles ne seraient pas là souvent », ajoute la capitaine. « À nous de faire en sorte de bien travailler ensemble. »
 

Priorité à l’école de rugby

 
« Pour rester dans l’élite, nous devons nous réorienter vers un modèle différent », constate Anne-Sophie Demoulin. La présidente souhaite agrandir l’école de rugby et continuer de s’appuyer sur une formation bretonne qui a déjà fait ses preuves. « Nous avons sorti Caroline Drouin, Jade Le Pesq qui est Normande mais chez nous depuis 16 ans, ou encore Marie-Aurélie Castel, originaire du Finistère, qui commence à pointer le bout de son nez et à être sélectionnée dans le XV de France », énumère Vincent Brehonnet. « Mais aujourd’hui, la seule formation rennaise ne suffit pas, il faut chercher des filles ailleurs. Il faut créer un modèle en se rapprochant des autres clubs bretons mais, mailler le territoire est difficile car la région est grande. » « Notre rôle est de partager notre savoir-faire avec les autres structures du territoire », abonde Anne-Sophie Demoulin. « Il y a de nombreux clubs de rugby féminin qui travaillent bien à Saint-Malo, Brest ou encore à Concarneau. » La découverte de futurs talents passe également par les liens noués avec les enseignants, les universités et les maisons de quartiers. « Nous avons besoin de communiquer pour rappeler que le rugby féminin existe », souligne la présidente. « Nous avons quatre petites filles de 6 ans originaires de Bretagne qui ont signé à l’école rugby. C’est un projet en cours, mais un travail de longue haleine. » L’apprentissage des bases du ballon ovale dès le plus jeune âge permet aux filles d’arriver mieux préparées dans l’équipe U18 qui évolue en Fédérale. « Elles ont remporté leurs premiers matches dans le niveau 1 », relate Anne-Sophie Dumoulin. « Comme elles vont aussi au pôle espoir, elles progressent bien, mais nous attendons de voir la suite. Car le niveau U18 a lui aussi beaucoup augmenté. Il y a 4, 5 ans, une jeune femme pouvait se mettre au rugby à 18 ans et évoluer en élite, maintenant ce n’est plus possible. » L’implication des joueuses seniors est également primordiale pour permettre aux plus jeunes d’éclore.  « Nous allons voir les cadettes et le pôle espoir pour créer un lien avec cette génération et construire l’avenir avec elles », précise Miléna Buzenet.
 

 

Le rugby gagne du terrain en Bretagne

 
Afin de conserver les rugbywomen et d’en attirer de nouvelles dans l’effectif de l’équipe fanion malgré le statut amateur, le Stade Rennais Rugby applique le double projet. « Quand les filles viennent chez nous, c’est pour le sport mais aussi pour s’insérer professionnellement », détaille Anne-Sophie Demoulin. « Rennes est une ville universitaire, c’est un plus pour les jeunes. » « Je suis encore en études sur place et j’ai donc pu rester dans mon club de cœur », confirme Miléna Buzenet. « J’aimerais faire en sorte de continuer ici. » Le club veut motiver les femmes avec un projet sportif intéressant s’appuyant sur la qualité des entraînements. « Je suis entouré par trois entraîneurs et une préparatrice physique très compétents, qui permettent de faire valoir la qualité sportive », avance Vincent Brehonnet. « Les filles sont désireuses de se professionnaliser. Elles commencent à demander une préparation physique qu’elles peuvent réaliser en autonomie et des entretiens individualisés. » Voir de plus en plus de rugbywomen à la télévision, en particulier l’équipe de France, accélère la démocratisation de cette pratique, même dans une région où le ballon ovale a encore du mal à s’imposer. « Le regard des gens commence à changer, même si la Bretagne n’est pas une terre de rugby », remarque la capitaine.  « On bénéficie aussi de l’exposition du RC Vannes qui joue en Pro 2 et du Rennes EC rugby en Fédérale 1 chez les hommes. De notre côté, nous devons continuer à faire parler de nous. » Continuer à se développer pour conserver cette dynamique. « Nous voulons rester au plus haut niveau du rugby féminin, mais également accueillir des jeunes de tous les niveaux pour ne pas faire que de l’élite », résume Anne-Sophie Demoulin.
 

 

Le Stade Rennais Rugby en chiffres :
Par Leslie Mucret