L’avenir de l’athlétisme handisport se dessine à Saint-Cyr-sur-Loire

Illustration during the Handisport Open Paris 2018 on June 15, 2018 in Paris, France. (Photo by Aude Alcover/Icon Sport)

Le Pôle Espoirs Athlétisme Handisport a vu le jour il y a deux ans pour préparer la future génération d’athlètes pour les Jeux paralympiques de Paris 2024, mais aussi aider ces jeunes à gagner en confiance et en autonomie.

 
La génération des athlètes français qui disputeront les Jeux paralympiques de Paris en 2024 est déjà dans les starting-blocks. À Saint-Cyr-sur-Loire (Indre-et-Loire), six jeunes encore dans leur cursus scolaire s’entraînent assidûment au Pôle Espoirs Athlétisme Handisport, l’unique structure de ce genre en France qui accueille ces sportifs à partir de 13 ou 14 ans. « L’objectif du pôle est avant tout la formation technique », précise Gwénaël Lanne-Petit, coordinateur et entraîneur. « Nous souhaitons accompagner ces jeunes dans leur triple projet : sportif, scolaire et social. » Le projet d’une telle structure portée par la Fédération française handisport est né en 2017. Après une année d’expérimentation, le Pôle Espoirs Athlétisme Handisport a pu mettre en place son plan de performance à la rentrée 2018, ayant obtenu son label. « C’était une demande de la fédération de structurer un peu plus l’athlétisme dans le handisport », raconte Gwénaël Lanne-Petit. « Un compromis a été trouvé entre entraîner les plus jeunes et le centre fédéral de Talence où le niveau est plus élevé. Le choix de Saint-Cyr-sur-Loire a permis de mieux mailler le territoire. » Déjà référent jeunes athlétisme handisport à la fédération, Gwénaël Lanne-Petit, membre du Réveil Sportif Saint-Cyr Athlétisme, a porté ce projet et continue de s’appuyer sur son club pour le faire vivre. « Et la Ville nous prête gracieusement le stade Guy Drut », ajoute-t-il. Le Comité régional handisport Centre-Val de Loire gère administrativement la structure, avec des fonds propres, mais également grâce à l’entrée que paye les sportifs. La structure reçoit également des aides du Conseil régional, de la Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale et de partenaires privés locaux.

Un esprit de groupe

Gwénaël Lanne-Petit entraîne six athlètes, trois filles et trois garçons, atteints de différents handicaps sur différentes disciplines. Les jeunes qui pratiquent debout se spécialisent dans le sprint et le saut, tandis que les sportifs en fauteuil roulant s’améliorent sur des courses allant du 100 m au demi-fond. « Avant d’être acceptés, les athlètes passent des tests afin d’évaluer leur potentiel physique, technique et psychologique », relate le coordinateur. « Leur admission dépend aussi de leur projet scolaire. » Le groupe du Pôle Espoirs n’a pas changé depuis deux ans. Du mouvement a cependant eu lieu à la rentrée, un jeune s’en va suivre des études de kinésithérapeute à Paris, tandis qu’un nouveau va arriver. « Nous organisons des périodes de recrutement pour rencontrer les athlètes potentiels avec un projet bien ficelé », explique Gwénaël Lanne-Petit. « La limite des capacités d’accueil n’est pas atteinte, mais je privilégie la qualité à la quantité. Il faut pouvoir s’occuper de tout le monde au même niveau pour que tout le monde progresse. » Au Pôle Espoirs depuis sa création, Alice Métais, déficiente visuelle, court sur 100 m, 200 m et 400 m. « J’ai rencontré Gwénaël sur une compétition d’athlétisme, sport que je pratique depuis 4 ans. Comme je n’habitais pas loin du Pôle Espoirs, il m’a conseillé de venir. Tout se passe très bien. C’est intéressant de côtoyer d’autres athlètes au quotidien. Nous avons un vrai esprit de groupe. »
 

Objectif Jeux paralympiques

Le programme est dense lorsqu’on est athlète au Pôle Espoirs : sept à huit entraînements par semaine. « Les plus jeunes en effectuent un peu moins, je m’adapte à leur niveau d’entrée », précise l’entraîneur. De plus, un suivi médical assuré grâce à un médecin, un kinésithérapeute, un psychologue, un podologue, ainsi qu’un travail de préparation mentale et le profil moteur sont effectués. « Nous voyons des progrès sur le plan de la performance qui augmente. Elle se concrétise par des sélections », se réjouit Gwénaël Lanne-Petit. Alice Métais a participé aux Championnats d’Europe élites en août 2018. « J’avais travaillé pour ça, mais ma sélection a été une vraie surprise. C’est une expérience enrichissante d’être sur une grosse compétition, j’ai appris beaucoup de choses. » Cerise sur le gâteau, elle est entrée en finale du 100 m et du 200 m. Autres performances à souligner, les sept médailles, dont trois en or, ramenées par trois athlètes lors des Jeux européens paralympiques de la jeunesse en juin dernier en Finlande. Deux étaient aussi engagés en août dernier aux championnats du monde juniors de para-athlétisme en Suisse. L’objectif de la structure de Saint-Cyr-Sur-Loire est clair : que les athlètes arrivent à leur meilleur niveau pour les Jeux paralympiques de Paris en 2024. « On sera très content si on va aux Jeux de Tokyo, mais c’est l’année prochaine, donc un peu tôt », confie Alice Métais. « Le but est d’être performant pour Paris 2024. »

Emploi du temps sur mesure

Faire des résultats en compétition de haut niveau et se préparer pour les Jeux paralympiques ne sont pas les seuls objectifs au Pôle Espoirs Athlétisme Handisport. La structure accorde beaucoup d’importance au parcours scolaire de ses jeunes. Le lycée Choiseul de Tours a favorablement répondu au projet proposé par Gwénaël Lanne-Petit et la fédération. Une équipe pédagogique suit les athlètes, s’assure que les notes sont bonnes ou que les compétences sont en cours d’acquisition et met en place des cours de soutien et de rattrapage. « Nous avons un emploi du temps aménagé et nous pouvons rater des cours que l’on rattrape plus tard pour se rendre sur des compétitions », explique Alice Métais. La jeune fille de 18 ans a passé une partie des épreuves du bac en juin dernier. « En terminale, nous avons la possibilité de passer le bac sur deux ans. Je me présenterai aux dernières épreuves l’année prochaine. » Même la cantine met les petits plats dans les grands pour ces athlètes. « Nous avons des tables d’aliments qui permettent aux sportifs de manger plus », raconte la jeune sportive.  En plus du sport et du suivi scolaire, l’équipe autour du Pôle Espoirs met au quotidien tout un travail en place pour augmenter la confiance en soi des jeunes athlètes. « Nous allons leur apprendre à sublimer leur handicap auprès des autres collégiens et lycéens, leur faire comprendre que ce n’est pas une difficulté », explique Gwénaël Lanne-Petit. « Il y a un accompagnement vers l’autonomie, se prendre en charge dans sa vie quotidienne. Par exemple, l’un des internes va bientôt prendre un appartement. » L’entraîneur et coordinateur résume ainsi la fonction de la structure : « Au Pôle Espoirs Athlétisme Handisport, nous leur proposons une solution pour progresser dans leur quotidien. »

Et après le bac ?

Au bout du parcours scolaire, plusieurs choix s’offrent aux jeunes : un cursus universitaire à Tours pour rester près de Saint-Cyr-sur-Loire ou à Bordeaux pour s’entraîner dans la structure de Talence. « Nous les accompagnerons aussi s’ils rentrent dans un club fort de niveau national », ajoute Gwénaël Lanne-Petit.

Les six athlètes du Pôle espoirs athlétisme handisport :

Alice Métais
18 ans – Née le 28 mai 2001
Disciplines : 100 m, 200 m et 400 m
Palmarès : sélectionnée pour les Championnats du Monde U20 (2019), double finaliste européenne sur 100 m et 200 m (2018)
 
Yasser Musanganya
17 ans – Né le 17 mai 2002
Disciplines : du 100 m au 1 500 m
Palmarès : champion du monde U20 sur 200 m (2019), double médaillé de bronze sur 100 m et 400 m aux Championnats du monde U20 (2019), champion d’Europe U20 sur 100 m, 200 m et 800 m aux Jeux paralympiques européens de la Jeunesse (2019)
 
Charlotte Picard
16 ans – Née le 29 mars 2003
Disciplines : 100 m, 200 m et longueur
Palmarès : médaillée de bronze sur 200 m aux Championnats de France en salle (2017)
 
Tom Picard
19 ans – Né le 13 décembre 1999
Disciplines : 100 m, 200 m et longueur
Palmarès : médaillé de bronze à la longueur aux Championnats de France en salle (2018), médaillé de bronze à la longueur aux Championnats de France en plein air (2018)
 
Typhaine Soldé
17 ans – Née le 8 mai 2002
Disciplines : 100 m, 200 m et longueur
Palmarès : vice-championne d’Europe U20 en lancer de poids aux Jeux paralympiques européens de la jeunesse (2019)
 
Paul Singer
19 ans – Né le 5 mars 2000
Disciplines : du 100 m au 1 500 m
Palmarès : vice-champion d’Europe U20 sur 400 m aux Jeux paralympiques européens de la Jeunesse (2019), médaillé de bronze U20 sur 100 m et 800 m aux Jeux paralympiques européens de la jeunesse (2019)

Par Leslie Mucret