Cyril Tommasone : « Aux arçons, ça passe ou ça casse »

Cyril Tommasone, FRA, during apparatus final at 2018 Artistic Gymnastics World Championships in Doha; 02/11/2018; Photo : Schreyer / Icon Sport

Le gymnaste lyonnais de 31 ans, spécialiste du cheval d’arçons, vient de se lancer dans un nouveau mouvement qui doit, c’est son ambition, l’envoyer sur le podium des JO de Tokyo l’an prochain.

 

Vous venez de terminer 2e à Bakou lors d’une épreuve de Coupe du monde. Est-ce encourageant ?

Cela a été une étape décisive dans mon avancée et même une révélation sur la composition de mon mouvement que j’ai fait évoluer. J’ai changé deux éléments pour voir si la note d’exécution serait meilleure. Les deux éléments que je réalisais en jambes écartées, je les réalise maintenant en jambes serrées. Je suis moins pénalisé, les huit juges sont unanimes sur cette figure alors qu’ils me notaient plus sévèrement jusque-là. Il n’y a plus d’hésitation sur la composition du mouvement. C’est peut-être de Bakou que tout est parti.

Même si cela s’est moins bien passé à Doha, la semaine d’après…

J’ai fini 9e ex-æquo et je ne me qualifie pas pour la finale. Donc il y a eu de la déception mais jusqu’au 9e élément, c’était bon, ça a péché sur le 10e. Je commets deux grosse fautes et je rate la finale pour 15/100e. Malgré cela, c’était positif avec la mise en place de ce nouveau mouvement avec une note de départ assez élevée. Il faut que je continue à travailler dans ce sens-là et « ça va rentrer ».

Quelle est la prochaine échéance ?

Ce sont les Championnats d’Europe en Pologne (du 10 au 14 avril). J’y vais avec l’ambition de réaliser ce nouveau mouvement, le réussir et décrocher une finale puis aller chercher une médaille.

Depuis quand avez-vous décidé de vous consacrer uniquement au cheval d’arçons ?

C’est une décision prise en concertation avec Anatoli (Voronzov, son entraîneur historique à la Convention gymnique de Lyon, NDLR) et le staff technique et médical de l’équipe de France après les JO de Rio. J’avais des soucis à l’épaule et au coude. Je n’ai pas décidé d’arrêter le reste. On m’a dit : « soit tu arrêtes, soit on va devoir t’opérer et tu oublies les JO, ta carrière est terminée. » J’ai donc évité l’opération, je passe par des infiltrations pour arriver aux JO.

« Bouffer » uniquement du cheval d’arçons, n’est-ce pas frustrant ?

C’est un grand mot, il y a plein d’aspects autour du cheval d’arçons : de la musculation, de la souplesse, toute une préparation autour. C’est une autre manière de s’entraîner. On mise tout sur un agrès. Cela veut dire qu’on ne peut pas se rattraper ailleurs, donc il ne faut pas se louper. C’est un virage difficile à aborder mais je n’ai plus le choix.

En quoi les arçons sont un agrès très particulier ?

La moindre petite erreur ne pardonne pas. C’est un agrès d’équilibre, on le compare souvent à la poutre chez les filles. Si on place mal une main, s’il y a une épaule qui n’est pas au-dessus du cheval, qui sort un petit peu, c’est tout de suite la chute, c’est très difficile à rattraper. Psychologiquement, c’est sans doute l’agrès le plus difficile. Tous les « gyms » (les gymnastes) stressent avant le cheval d’arçons parce que ça passe ou ça casse.

Vous avez fini 5e à Londres en 2012, 4e à Rio en 2016… la logique voudrait que vous soyez 3e en 2020 à Tokyo.

(rires) Je travaille tous les jours pour aller chercher cette médaille. Avant de parler JO, il y a cette qualification aux Championnats du monde eux-mêmes qualificatifs pour Tokyo. Ce sera à Stuttgart, il faut être dans les douze meilleures équipes. Si l’équipe de France se qualifie, on aura quatre places aux JO.

Êtes-vous conscient que ça peut être vos dernières olympiades ?

Après Tokyo, je mettrais sans doute un terme à ma carrière, mais je n’ai aucune certitude. On verra comment ça se passe à Tokyo et on décidera en fonction. Je n’ai qu’un seul objectif, c’est d’aller décrocher des médailles. C’est ce qui me motive. J’en ai déjà eues aux Europe et aux Monde, il me reste donc les JO.

Avez-vous déjà une idée de reconversion ?

Oui, j’ai entamé un cycle de formation pour devenir entraîneur. J’ai passé un diplôme d’État et je suis une formation pour le DES dans le cadre de mon contrat avec l’INSEP qui me permet d’être détaché à 70 % sur mon sport. Le reste du temps, je vais à l’INSEP pour commencer à encadrer un groupe de jeunes une à deux fois par mois.

Propos recueillis par Sylvain Lartaud