Badminton – Yohan Penel : « Les clubs sont la raison d’être de la fédération »

«Yohan Penel est candidat à la présidence de la Fédération française de badminton. Il évoque son parcours, détaille le programme du collectif Tous Badminton et insiste sur la nécessité de changer les choses.

 
Pourquoi vous présentez-vous à la présidence de la fédération française de badminton ?
C’est parti d’une démarche de réorientation professionnelle entamée en 2018. Je suis chercheur en mathématiques, j’ai un doctorat en maths, et je voulais profiter de la dynamique Paris 2024 pour me réorienter dans le sport, dans lequel je suis investi depuis 20 ans. Du coup, j’ai fait un Master 2 STAPS à l’université Paris Sud, Politiques publiques et stratégiques des organisations sportives, que j’ai validé en VAE (validation des acquis). En rédigeant mon mémoire sur la construction des politiques fédérales à travers le prisme du développement durable, au vu des critiques auxquelles j’aboutissais, j’ai fait le choix de m’engager.
 
Est-ce facile d’être pris au sérieux quand on est un jeune candidat de 36 ans ?
Il y a plusieurs écueils : l’âge, le fait que l’on me mette dans la catégorie « développement durable » parce que ce sont les missions que j’effectue aujourd’hui à la fédération. On me juge donc incompétent sur ce qui fait le cœur de la politique fédérale selon certains : le haut niveau. L’âge et le fait que je n’ai jamais été élu au sein du Conseil d’administration de la fédération jouent aussi. Je suis un bénévole nommé, en tant que responsable de commission. Maintenant, je passe plus de temps au siège fédéral que la majorité des élus, je connais tous les salariés. C’est ce qui m’a permis de me faire ma propre idée en quatre ans des dysfonctionnements qu’il peut y avoir en interne à la fédération.
 

« Travailler avec tout le monde »

 
Depuis l’annonce de votre candidature, est-ce plus compliqué pour vous ? Y a-t-il plus de méfiance envers vous ?
Oui, c’est beaucoup plus compliqué. Au début, ça faisait rire les gens parce que la démarche que l’on a initiée est innovante car ce n’est pas ma candidature, mais la candidature d’un collectif qui s’appelle Tous Badminton. On a voulu que ce soit totalement collaboratif, avec des outils sur les réseaux sociaux qui ont permis de créer une communauté de 2366 membres aujourd’hui pour expliquer aux gens ce que l’on veut faire. Le gros souci aujourd’hui, qui est valable dans de nombreuses fédérations, c’est que les dirigeants tiennent volontairement les licenciés éloignés des grands enjeux, des grandes décisions, et même des élections. Dans plusieurs fédérations, les licenciés ne savent même pas qu’il y a des élections à la fin de l’année ou en début d’année prochaine. C’est délibéré, afin que cela reste dans un certain entre-soi de gens qui comprennent comment ça marche. Nous avons voulu faire cette démarche pédagogique, pour que de plus en plus de gens soient en capacité, demain, de se retrouver en responsabilité.
Notre candidature a dérangé parce qu’on a fait le pari de la transparence, on a publié beaucoup de données, en étant le plus factuel possible, pour que les gens se fassent leur propre idée. Cela a généré des débats très sains sur les réseaux sociaux, mais qui dérangent beaucoup, notamment quand on parle du nombre de démissions sur l’Olympiade. Il y a eu 15 départs sur un collectif de 30 salariés. Nous avons juste publié le chiffre, et ça a beaucoup dérangé certains salariés. De la même manière, on expose la stratégie numérique, en conséquence les salariés en charge du numérique se sentent attaqués. Il est clair que cela se passe très bien au sein du secteur dans lequel j’évolue, parce que l’essence même du développement durable, c’est la transparence et la pédagogie. Je n’ai aucun souci de ce côté-là. Par contre avec les autres secteurs, clairement, le climat s’est tendu.
Mais le message que l’on veut adresser à tout le monde, c’est que notre but est de travailler avec tout le monde. Certains salariés nous voient comme des vilains méchants qui vont licencier tout le monde car personne ne donne satisfaction. Ce n’est pas du tout notre discours. Le but est d’analyser les enjeux, les compétences de chaque salarié et d’éventuellement repositionner les salariés en fonction de leurs compétences, et ne pas les laisser sur un poste pendant 20 ans sans la moindre perspective d’évolution. On a professionnalisé de badminton, au sens où il y a de plus en plus de salariés dans la communauté, mais on a oublié de professionnaliser le fonctionnement. On a un fonctionnement très archaïque, qui porte préjudice à l’impact de nos politiques fédérales. Aujourd’hui, la fédération est une PME de 10 millions d’euros de budget, avec 30 salariés, 30 cadres d’Etat, 30 bénévoles. Ca ne peut plus se gérer comme une petite association du XXe siècle. Nous, on arrive avec un collectif très diversifié, ça va de 23 à 70 ans, avec des gens du public et du privé, qui vont apporter une autre culture de la gestion des ressources humaines, qui doivent être plus en osmose et en transversalité que ce qu’il y a aujourd’hui, où c’est très cloisonné. C’est l’élu qui décide et le salarié qui exécute sans avoir son mot à dire. Ca ne participe pas à une bonne gouvernance de la fédération.
Nous arrivons avec la volonté de poser des questions, de questionner le fonctionnement global là où d’autres considèrent qu’il y a des sujets qui ne doivent pas être traités, que c’est comme ça et que ça marchera toujours comme ça. Nous ne sommes pas dans le dégagisme absolu, mais dans la volonté de questionner le fonctionnement pour voir ce qui va et ce qui ne va pas, avec des diagnostics qui sont partagés, et en faisant en sorte que ce soit une belle aventure collective au service d’une certaine vision : les motivations et les leviers d’implication des citoyens dans le sport ont évolué. Aujourd’hui, la compétition est un levier de structuration, de fidélisation et d’épanouissement, mais il y en a d’autres. Aujourd’hui, les fédérations s’y intéressent peu au-delà des belles annonces. C’est pour cela qu’on fait partie d’un collectif de candidats dans différentes fédérations, qui ont répondu à un appel citoyens.
 

« Le bon moment pour enclencher une petite révolution culturelle »

 
Dans sa globalité, votre équipe est assez jeune. C’est un vent du renouveau nécessaire ?
La fédération est vieillissante dans le fonctionnement. On ne fait pas partie des fédérations avec les moyennes d’âge les plus élevées, même si nous avons un président qui a 74 ans et qui s’arrête parce qu’il est fatigué, même s’il est là par hasard, puisqu’il a été élu en 2016 dans des circonstances très particulières. De notre côté, nous voulons démontrer qu’il y a d’autres manières de penser le sport fédéral, qu’il n’y a pas une unique approche. Il faut tirer les leçons du passé. Il y a des choses positives qu’il faut évidemment conserver, mais on arrive avec une nouvelle culture. Les gens qui sont dans le collectif ne se connaissaient pas, pour la plupart, il y a un an. On s’est fédéré autour du manifeste, que j’avais écrit à la fin de mon mémoire dans le but de fédérer autour d’une vision du badminton, et pas du tout autour de la personne providentielle. Je n’ai pas cette prétention-là. Les gens se sont retrouvés autour de valeurs, et il y a un certain nombre de jeunes dirigeants motivés et passionnés. Mais ça ne s’est pas fait sur un critère d’âge. Le collectif s’est étoffé petit à petit en voyant le travail de pédagogie qu’on faisait sur les réseaux sociaux. On souhaite enclencher quelque chose de nouveau, parce que nous partageons les constats sur les dysfonctionnements, sur le fait que la fédération ne répond pas du tout aux attentes du terrain, que sur le haut niveau, nous avons de jeunes athlètes qui sont dégoûtés et qui arrêtent le badminton après des années de sacrifices. Aujourd’hui, nous avons des championnes de France du début des années 2000 qui ne sont même plus licenciées, elles ne veulent plus entendre parler du badminton. Tout ça mis bout à bout, on se dit que c’est le bon moment pour enclencher une petite révolution culturelle, et de changer les pratiques, au-delà de changer les personnes.
 
Savez-vous déjà quels seront vos adversaires ?
Aujourd’hui, il y a deux autres listes déclarées et assumées, qui correspondent globalement à une scission du Conseil d’administration actuel, avec d’un côté les partisans de la continuité et de l’autre les frondeurs. La première est portée par le Secrétaire général de la fédération, Jean-Michel Richard. La seconde est portée par Nathalie Huet, qui a été vice-présidente en charge du développement durable, puis vice-présidente en charge des territoires, et qui aujourd’hui mène une liste d’opposition.
 

« Être en phase avec la société actuelle »


Etes-vous convaincu de pouvoir gagner, où vous lancez-vous une première fois « pour voir » ?
Concernant nos chances, nous fonctionnons sur un mode de démocratie indirecte, ce sont les grands électeurs qui votent, et ils vont tous être renouvelés à partir du samedi 3 octobre jusqu’au 14 novembre. Comme les électeurs ne sont pas connus à ce jour – et évidemment notre stratégie est de faire émerger une nouvelle génération de grands électeurs – tout se jouera en grande partie en amont. Est-ce qu’on aura réussi à faire suffisamment la pédagogie des enjeux et à montrer aux gens qu’ils peuvent être acteurs du badminton et pas uniquement cantonné à la critique sur les réseaux sociaux ? Si c’est le cas, on aura réussi ce pari-là. Nous avons lancé notre observatoire du badminton, qui a vocation à continuer au-delà des élections. Etant chercheur moi-même, je pense qu’on ne s’appuie pas assez sur la science pour mieux connaître nos pratiques et nos pratiquants. Cet observatoire, c’est un leg qu’on fait à la communauté. Après, dire ce qu’on fera dans quatre ans… Ce qui est sûr, c’est que dans le projet qu’on porte, il y a un axe majeur sur la gouvernance avec la limitation à deux mandats. Nous voulons une véritable ouverture du collège électoral. Nous voulons créer quatre collèges : un des ligues régionales, un des comités départementaux, un des clubs qui n’ont pas leur mot à dire aujourd’hui dans la gouvernance et ce n’est pas normal, et un avec des badistes tirés au sort. On y tient, c’est être en phase avec la société du XXIe siècle. Ce qui est sûr, c’est que si nous gagnons cette année, dans huit ans on passera la main. Si on n’est pas élu, je ne peux pas me prononcer maintenant sur une prochaine candidature.
 
Ce n’était pas possible d’effectuer un rapprochement avec la liste des frondeurs ?
Nathalie Huet, je lui dois ma place aujourd’hui, car c’est elle qui est venue me chercher à l’époque, sans se douter évidemment que quatre ans plus tard on se retrouverait dans cette position. Comme nous sommes un jeune collectif de personnes moins connues dans la communauté, nous avons commencé très tôt. Cela fait un an et demi que nous sommes en campagne. Il est d’ailleurs temps que ça se termine. Les autres ont eu le temps de se positionner par rapport à nous. Nathalie fait partie de mes amies, pourtant elle a fait le choix – même si je lui ai longtemps proposé de partir ensemble quitte à lui laisser la tête de liste – de partir sur une thématique forte qui est : il faut une femme à la tête de la fédération. Je ne la rejoins pas sur la façon de dire qu’avoir une femme présidente va soudainement tout résoudre. La représentativité des femmes est un véritable enjeu et nous avons de vrais soucis de ce côté-là. On le voit avec les statuts de la fédération qui viennent d’être changés à trois mois de l’élection, ce qui fait partie des petits scandales du mandat. Ce sont des listes qui doivent être absolument paritaires, et on se rend compte que beaucoup de femmes refusent de s’engager au niveau national.
Sur le rapprochement avec la liste des frondeurs, on s’est demandé si ce n’était pas disperser les voies de l’opposition, car il y a toujours une prime au sortant, il n’y a rien à faire. La réponse a été non. On fait avec. Et c’est à la limite la liste des sortants qui nous fait des appels du pied, à la surprise générale parce qu’on ne partage strictement rien.
 

« On aimerait un vrai débat d’idées »

 
Quelles sont les grandes lignes de votre programme et quels sont les principaux points de divergences avec vos adversaires ?
Pour l’instant, j’ai du mal à comparer parce qu’il n’y a strictement rien en face. Il y a deux têtes de liste, c’est tout. Ils ne communiquent pas sur les membres de leur collectif, ni sur les éléments de programme. Nous, cela fait un an et demi que l’on débat avec la communauté, mais pas avec les autres listes. Nous avons été les premiers à candidater et les premiers à publier notre programme. Il tourne autour de cinq axes. Et chez les autres, il n’y a rien. La campagne s’achèvera le 11 décembre, et aujourd’hui il n’y a rien. C’est très perturbant parce qu’on aimerait un vrai débat d’idées, que les gens puissent se faire leur opinion sur les trois projets. Mais les autres sont plus habitués aux petites campagnes en sous-marin, à aller serrer les bonnes mains au bon moment, et finalement le programme est accessoire. Rien que dans la démarche, on a une part d’innovation en publiant notre programme très en avance, quitte à ce que nos idées soient récupérées par les autres. Mais comme notre démarche, c’est que nos idées progressent, c’est de toutes façons bénéfique pour nous.
Concernant les 5 axes du programme, il y a 3 préalables et 2 piliers. Pour les préalables, la première chose est de retravailler complètement le fonctionnement de la fédération. On ne peut pas mettre en œuvre un projet ambitieux et en rupture si on a des dysfonctionnements en interne. C’est indispensable. Ensuite, il faut resouder notre communauté. Aujourd’hui, nous avons des fractures profondes entre les licenciés d’un côté, les comités départementaux et les ligues d’un autre et la fédération d’un troisième. Aujourd’hui, le dialogue est quasiment rompu, et la crise sanitaire a renforcé ce sentiment de déconnexion, d’absence de dialogue et de concertation. Le troisième axe, c’est travailler sur la mise en confiance des dirigeants. Nos dirigeants associatifs sont complètement désenchantés parce qu’il y a des comportements des adhérents de plus en plus difficiles à gérer, l’ADN de l’associatif est un peu dénaturé, la crise sanitaire et la crise économique derrière ne favorisent pas une projection dans l’avenir. Il y a des problèmes de créneaux, des problèmes de modèle économique. Le rôle de la fédération, sa raison d’être, ce sont ses clubs affiliés. Il faut faire un diagnostic des inquiétudes des dirigeants et qu’on y réponde. Ce sont les trois préalables : connaître notre communauté, comprendre ses attentes. Les deux piliers sont la performance sportive et la performance sociale. Pour la performance sportive, dans un sport avec une « géopolitique » très asiatique, comme le tennis de table, la badminton émerge quand même petit à petit, notamment en Europe avec une belle générations. Mais il y a encore du boulot, notamment sur la gestion de la performance à l’aide de la science, de la partie médicale. Nous voulons vraiment travailler en synergie avec des acteurs de la société civile, qui ne sont pas toujours plébiscités aujourd’hui. C’est une partie importante, indispensable. Nous avons deux missions de service public confiées par l’Etat : le haut niveau et la performance sociale. C’est de ce côté que se situe la vraie révolution. On veut que nos clubs dépassent leur rôle d’acteur sportif sur leur territoire pour devenir des acteurs socio-éducatifs. Le club ne peut pas y arriver tout seul, il faut construire des outils, des partenariats avec des acteurs non-fédérés aujourd’hui comme l’Agence de l’éducation par le sport. La question, c’est quelle est la finalité de la pratique sportive ? Quelle est la raison d’être de la fédération ? Pour de nombreux dirigeants d’un certain âge, c’est la compétition d’abord et le reste après. Mais nous avons une sociologie de pratiquants qui est spécifique au badminton, nous avons 33% de nos licenciés qui ont déjà fait une compétition dans leur vie. C’est très peu pour une fédération olympique et paralympique. Ce n’est pas forcément un échec des politiques fédérales, c’est juste que le badminton est un outil formidable d’émancipation et d’épanouissement, et la compétition n’est pas le seul outil. On a donc 33% de compétiteurs qui adorent ça, 33% de gens qui ne sont pas allés vers la compétition car les formats ne leur plaisent pas, qu’ils n’ont jamais essayé mais ça leur plairait bien, et 33% de gens qui ne veulent pas en entendre parler. Et ceux-là, il faut qu’on travaille sur la façon de les fidéliser, comment travailler sur leurs attentes. Et je pense que si l’on a autant de mal à créer des partenariats plus forts et durables avec des acteurs non-fédérés, c’est parce qu’on ne s’est pas posé la question du sens des politiques fédérales. Effectivement ces gens-là n’apporteront rien sur la partie performance sportive dans un premier temps, mais si on part du principe que l’on a deux missions de service public, le haut niveau et le sport pour tous, les deux jambes doivent avoir la même taille. Aujourd’hui, on a une grande jambe et une petite jambe, et ce n’est pas pratique pour marcher.
 

« Le modèle économique actuel de la fédération repose à 65% sur la licence »

 
Le sport amateur est particulièrement touché par la crise sanitaire. Est-ce inquiétant de voir un retard de la prise de licences (7% en septembre) ?
C’étaient les chiffres au 10 septembre. Depuis, c’est beaucoup plus négatif. Avant la décision du ministre de la Santé de fermer certains gymnases, on était déjà à -15% de licenciés sur la même période. Concrètement, avec la fermeture de gymnases sur des territoires très dense, nous sommes impactés. Tout le projet que nous portons, il y a une partie sur la structuration interne qu’on mènera à bien quoi qu’il arrive. Pour toute la partie projet à impact, on a de quoi être inquiet parce que le modèle économique actuel de la fédération repose à 65% sur les produits de la licence. Nous sommes sur un modèle avec beaucoup d’œufs dans le même panier. Une chute de 30 à 40% du nombre de licenciés, ça veut dire un impact direct sur les finances de la fédération. Nous sommes inquiets concernant la mise en place rapide d’un certain nombre de mesures. Mais cela nous invitera à faire un état des lieux de notre modèle économique actuel, qui a ses bons et ses mauvais côtés. Clairement, on doit changer notre approche. Aujourd’hui, on va quémander de l’argent, ce n’est plus comme ça que l’on va construire un partenariat économique. C’est pour cela qu’on porte en particulier dans notre projet le fait de créer un secteur Nouvelles économies du badminton, sur lequel on va réfléchir après avoir fait de la détection sur les territoires. Nous sommes donc inquiets à court terme et à moyen terme parce que c’est le modèle économique de la fédération qui s’écroule. D’un autre côté, ça peut être un mal pour un bien à partir du moment où on change de logiciel. Repartir avec une équipe qui souhaite juste perpétuer un système, elle n’aura pas la vision stratégique suffisante pour être résiliente face à la crise que nous sommes en train de traverser. Je dis toujours que dans 10 ans on jouera toujours au badminton en France parce que c’est un sport génial. Pour autant, est-ce que nos 2000 clubs existeront encore dans 10 ans, j’ai beaucoup plus de doutes, si on ne les prépare pas à affronter un certain nombre de menaces.
 

« L’enjeu de Paris 2024 : changer la place du sport dans la vie des citoyens »

 
Les JO 2024 à Paris vont arriver vite. Le badminton est-il obligé d’y briller pour la bonne santé de la fédération ?
Si les performances sont bonnes aux Jeux Olympiques, c’est mécanique, le nombre de licenciés dans la discipline va augmenter lors de l’Olympiade suivante. C’est important de briller aux Jeux autant sur l’après que sur le pendant. Il y a eu une tribune dans Le Monde il y a 15 jours pour dire que les J.O. ne servaient à rien et que ça coûtait beaucoup d’argent. C’est parce que la communication laisse à penser que Paris 2024 va être deux fois 15 jours pour les Jeux Olympiques et Paralympiques. Si ça se résume un événement spectaculaire d’un mois, alors on aura raté nos Jeux. Tout ce qui relève de Paris 2024 a commencé en septembre 2017 et doit perdurer au-delà de 2024. L’enjeu est clair, le gouvernement l’avait annoncé, c’est de changer la place du sport dans la vie des citoyens. Si on ne change pas ça, on aura raté les Jeux. On aura dépensé des milliards d’euros juste pour faire plaisir à une poignée de passionnés, qu’ils soient sur le terrain ou en tribunes. Il y a un Plan héritage, qui était le gros point fort de la candidature de Paris 2024, et tout se jouera là-dessus. Ce plan commence par le plan d’animation territoriale qui devrait déjà être en place. Au badminton c’est simple, à l’AG du 12 septembre, on n’a pas parlé une seule fois de Paris 2024, sauf pour dire que l’Agence nationale du Sport nous tape dessus pour réduire la taille des collectifs France et miser exclusivement sur trois ou quatre profils médaillables lors des J.O. Après, pour les Paralympiques, on a une vraie chance puisqu’on a des champions du monde. La performance progresse aussi chez les valides, pour autant, si on pense que Paris 2024 c’est juste réussir la performance sportive, on aura raté les Jeux. Il va falloir construire sur ce que le sport apporte à la vie des gens, sur la manière dont ça change leur vie. Ça peut être une meilleure vie sociale, une meilleure santé, le fait de se sentir acteur de son quotidien. Il n’y a que les associations qui peuvent fournir tout ça. Il faut une ambition de santé, une ambition éducative, une ambition de cohésion sociale et de mixité. Paris 2024 va être le fil rouge de la mandature, mais c’est un levier, pas une finalité. On va marteler ce message autant qu’il le faudra.
 

Propos recueillis par Simon Bardet